Alors qu’il est question d’un retour de Saïf al-Islam Gaddhafi dans la vie politique et économique de la Libye, voici les faits historiques auxquels il va devoir faire face…

Muammar Gaddhafi n’a pas fait la Révolution du 1er Septembre 1969 tout seul. Ils étaient douze amis, pour la plupart issus de milieux pauvres, plus une centaine de civils et de militaires. Cette Révolution a été appelée “La Révolution blanche” parce qu’elle avait eu lieu sans effusion de sang (ce qui est rare dans l’histoire du monde). Contrairement à ce qui a été maintes fois dit… c’est le peuple libyen qui, au début des années 80, a accordé à Muammar Gaddhafi le titre de Guide révolutionnaire.

En 2011, c’est bien cette Révolution, qui s’était poursuivie avec le passage de relais de la RAL (République Arabe Libyenne) à la JALPS (Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire Socialiste) ou État des masses, que les chefs d’États français (Nicolas Sarkozy), britannique (David Cameron), états-unien (Barack Obama) ont voulu détruire. Cette Révolution, malgré un long embargo de 1992 à 2003, avait conduit le peuple libyen à faire de la Libye, en décembre 2010, le pays le moins endetté de la planète. (La grande bourgeoisie occidentale, elle, n’a d’autre compétence que celle de mener les États à la faillite et de plonger les populations dans la misère ou dans les guerres…)

En 2011, c’est aussi, à travers cette Révolution qui trouvait progressivement des prolongements dans la création des États-Unis d’Afrique, la réelle indépendance et un véritable développement du continent africain qui étaient visé(e) par ces trois chefs d’États français, britannique, états-unien.

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Durant ces sept mois de guerre, de mars à octobre 2011, il y a eu la chasse aux révolutionnaires et à leurs proches qu’il était question de détruire jusqu’au dernier… Khoueldi El Hamidi était visé dans l’attaque – de nuit, par les forces de l’Otan commandées par le lieutenant-général Charles Bouchard – de la villa familiale où de nombreuses personnes étaient restées pour dormir après une fête d’anniversaire de l’un de ses petits-enfants : le révolutionnaire est sorti indemne de ces bombardements ; son fils, Khaled, qui était allé voir deux amis en ville, était témoin, à son retour à Sorman, de la dernière explosion qui achevait de détruire la maison, et découvrait que son épouse enceinte et ses enfants, ainsi que toutes les autres personnes, parentes ou amies de la famille, avaient perdu la vie. Abou Bakr Younis Jaber a été assassiné en même temps que Muammar Gaddhafi et le fils de celui-ci, Moatassem Billah.

Durant ces sept mois, les journalistes mainstream ont découvert qu’il y avait des Libyens noirs… Cela n’a pas empêché certain(e)s d’entre eux-elles de clamer que Muammar Gaddhafi était raciste ! Or, Abou Bakr Younis Jaber était un Libyen noir, et Muammar Gaddhafi et ses compagnons, au moment de faire la révolution afin de renverser la monarchie fantoche du roi Idriss 1er, ne s’étaient pas posé la question de savoir s’ils acceptaient ou pas les Noirs dans leur groupe. Les assassinats   de Muammar   Gaddhafi   et   d’Abou Bakr Younis   Jaber ont   été commandités : ce sont des crimes politiques, doublés de crimes crapuleux, triplés, pour Abou Bakr Younis Jaber, d’un crime raciste.

Aux manifestations des Libyens et des Libyennes, partout en Libye, contre la guerre, les groupes parlementaires français – sans distinction de droite ni de gauche – ont répondu, le 12 juillet 2011, en votant, comme un seul homme ou presque (excepté le parti communiste, mais de justesse…), la prolongation de trois mois des bombardements de l’OTAN sur le peuple libyen… (Une mention spéciale est à apporter aux écologistes qui ne sont jamais gênés par la pollution atmosphérique, environnementale, générée par les bombes dont ils savent que certaines sont munies d’ogives comportant de l’uranium appauvri.) Trois mois qui ont fait toujours plus de mort(e)s, toujours plus de blessé(e)s, toujours plus de destructions… Trois mois, le temps qu’il fallait aux trois chefs d’États occidentaux pour trouver Muammar Gaddhafi et le faire assassiner.

Le Conseil des Tribus de Libye, qui représentait 2.200 tribus, s’était réuni plusieurs fois sous les bombardements et avait fait des déclarations contre cette guerre, notamment le 3 juin 2011 : de même que l’UA (Union Africaine), il a été complètement ignoré par les trois chefs de guerre qui devraient répondre de leurs décisions et de leurs actes devant la CPI (Cour Pénale Internationale) si celle-ci ne se faisait pas une spécialité de ne juger que les chefs des pays de l’ex-Yougoslavie (Slobodan Milosevic), des pays arabes (Saddam Hussein) et des pays africains (Laurent Gbagbo, etc.).

Après la déstabilisation de la Tunisie (janvier 2011) et de l’Égypte (février 2011), les chefs d’États impérialistes-colonialistes avaient attaqué dans le même moment, en mars, la Libye et la Syrie. Il s’agissait d’empêcher la Tunisie et l’Égypte de porter secours à leur pays voisin, la Libye, et de mettre aussi la Syrie à feu et à sang. D’ailleurs, ces chefs d’États, qui voulaient faire condamner Muammar Gaddhafi par la CPI, réclament aujourd’hui la traduction devant la CPI de Bachar El Assad pour crimes contre l’humanité. Mais quel tribunal jugera des crimes – bien réels ceux-ci – des chefs d’États occidentaux qui massacrent les populations civiles sous leurs bombes ?

Enfin, il y a des personnes en France qui sont opposées à ces guerres à répétition : Afghanistan, Irak, Libye, Syrie, Ukraine, etc. Si la liberté d’expression existait, des ambassadeurs de France en Libye, qui avaient vécu dans le pays au contact de la famille Gaddhafi mais aussi de la population elle-même, auraient pu, en temps voulu – c’est-à-dire avant la guerre contre la Libye – apporter un éclairage sur ce qu’était le régime libyen : or, Christian Graeff, par exemple, n’a dû de pouvoir s’exprimer, au soir du 20 octobre 2011, sur France culture, en 4 minutes et 8 secondes (et encore, il faudrait enlever la présentation de l’entretien et les questions de l’intervieweuse…), qu’à la mort, le matin même, de Muammar Gaddhafi, de son fils, et d’Abou Bakr Younis Jaber…

Françoise Petitdemange

Photo: Tripoli avant la guerre

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