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19 avril 2024

La veine du racisme


La veine du racisme

par Alinea – mardi 27 octobre 2015

C’est en lisant un article sur la « merde » allemande, que j’ai eu envie de parler du racisme, et ce que je j’en pense depuis longtemps.

Au départ, il y a un sentiment partagé par tout le règne animal : l’étranger est-il un agresseur, un envahisseur ? On ne sait pas, donc, méfiance.

Que ce soit les abeilles ou n’importe quel mammifère, proie ou prédateur, l’errant qui se pointe, ou qu’on impose quand on est un mammifère dépendant de l’homme, interroge et induit un comportement de rejet qui, chez les animaux, n’est pas agressif, mais qui dicte une attitude de dominance « qui ne s’en laisse pas conter ». Montre-nous qui tu es et nous aviserons.

Donc, que l’homme ait ce genre de comportement – l’intrus va forcément créer un désordre-, me paraît tout à fait naturel. Mais l’homme, l’occidental très civilisé en tout cas, a beaucoup de parlote et pratiquement peu d’actes. Ce qui n’est pas toujours une mauvaise chose d’ailleurs !

Il y a la parole facile des nantis qui, de leur tour d’ivoire, ne risquant pas grand chose, prônent l’accueil comme le moindre de nos devoirs.

Je voudrais faire un petit aparté ici : la plupart pour ne pas dire la quasi totalité des humains que je rencontre, regarde, observe ou connais, ont perdu toute intuition – pour ne pas dire instinct- et sont à ce point déracinés, non pas de leur patrie mais de leurs racines animales, qu’ils ont aucun ressenti immédiat d’un danger, ou de son contraire, et, soit agressent sans raison, soit accueillent sans discernement. Ils s’isolent par leur agression pathologique ou se font avoir par leur docilité toute aussi pathologique. Ceci étant vrai pour n’importe quoi, un chien, un badaud, un rôdeur qui n’a pas la même allure qu’eux ! Le nombre et le changement d’ambiance d’un quartier ne faisant pas partie de cet aparté !

Tout est perverti en l’homme ou susceptible de l’être. Car plus rien n’est naturel. Au point que le naturel est banni comme un obscurantisme ou bien dévoyé, dans l’expression : « chasser le naturel il revient au galop », qui décrit plus l’irrationnel d’une personnalité qui ne peut être guéri, dépassé ou compris qu’une pulsion naturelle qui s’adapte aux circonstances.

C’est là que l’exemple de l’Allemagne , ou de VW plus précisément, s’insère.

Une entreprise allemande, réputée pour la fiabilité de ses productions, triche… et c’est toute l’industrie allemande qu’on met en doute, non seulement sa technologie et ses produits, mais son sérieux, puis, le pays tout entier. Pourtant, par ailleurs, nous savons tous que le B A BA de l’ultra libéralisme s’appuie sur cette tricherie, sans compter l’exploitation éhontée des travailleurs ( ceci dit, cette exploitation, en Allemagne ne concerne pas l’excellence de ses ouvriers de l’industrie, qui sont choyés bien plus que chez nous, mais tous les autres). Le lien de ma pensée est : un Arabe me vole une pomme : tous les Arabes sont des voleurs ; une industrie allemande triche : toutes les industries allemandes sont nulles. C’est comme un prétexte bienvenu. Et cela évite au passage l’approfondissement des causes dues aux faits politiques.

C’est cela, la veine du racisme : on hait la catégorie à laquelle appartient celui qui nous a spoliés, agressés, arnaqués,etc.

En ce qui concerne l’Allemagne, on s’en donne à cœur joie sans remords parce que le pays est puissant et nous brime. Mais on fait la même chose quand il s’agit de gens appartenant aux damnés de la terre ; qu’ils soient Gitans, Maghrébins ou noirs de peau, quand quelques-uns font des conneries, dont nous ne sommes pas directement victimes, c’est la communauté à laquelle ils appartiennent qui est conspuée, haïe, vouée aux gémonies.

C’est cela, la veine du racisme.

Là où le racisme est une véritable bêtise et non plus une méfiance naturelle à l’encontre du nouveau venu qui doit montrer patte blanche, c’est à cet instant où on généralise sans avoir un instant cherché la cause, sans avoir replacé le fait dans un contexte plus vaste où il trouverait sa logique, à défaut d’être louable.

Pourquoi Volkswagen a-t-elle triché ? Quelqu’un l’a dit ? Nous supputons que c’est par appât du gain ; c’est vrai qu’il est possible qu’enivrée par l’impunité générale, cette entreprise se croit au- dessus de tout soupçon, donc de tout contrôle, mais enfin, il ne s’agit pas là d’une négligence, d’un acte spontané et non réfléchi, mais bien d’une tactique de « management » !! Ne possède-t-elle pas la technologie pour réduire la pollution de ses véhicules – alors que tous les autres la possèdent- et, honteux de cette faille trouve un subterfuge-, ou bien les normes imposées par des ignorants sont-elles hors propos pour la technologie actuelle ? Mais en tout état de cause, cela concerne une entreprise privée, qui se trouve être allemande !

Je crois que le racisme, du moins en parlote, c’est aller au plus facile ; dans l’ignorance dans laquelle on nous laisse délibérément, s’attaquer aux causes précises ( ici l’industrie) ou premières ( en ce qui concerne l’immigration) est beaucoup trop difficile, hors de la portée de nos actes. Peut-être mettrions-nous même en danger notre confort qui devient relatif, et néanmoins certain comparé à d’autres peuples dans d’autres contrées, si nous avions une conscience sans ombre, de la réalité du monde et de ses effets induits.

Le racisme est un aveu d’impuissance, un aveu de faiblesse mais qui est si partagé qu’on peut le brandir sans honte. Mais il prend les atours d’une valorisation pour soi : si l’autre est si nul , dangereux ou quoi, c’est que nous, nous sommes beaux bons et forts…

Mais il n’est pas le seul, et, comme le prétexte à ce texte est la lecture que j’ai faite de quelques articles sur ce site, je brûle d’en nommer un autre : on parle beaucoup et à raison de cette guerre innommable en Syrie ; nous sommes nombreux à nous réjouir et à compter sur l’intervention russe, pour plusieurs raisons.

La première et la plus urgente serait de mettre fin à l’horreur que vivent les Syriens, mettre fin à la destruction de ce pays si toutefois il y a encore quelque chose à sauver, mais aussi, et la corrélation est évidente, mettre l’empire le nez dans sa merde, offerte aux yeux du monde entier : mensonges, hypocrisie, abus de pouvoir et d’influence, ineptie des buts, injustice ; injustice qui touche aussi, et largement, les ressortissants de cet empire.

Or il se trouve beaucoup d’esprits éclairés pour chantonner ou clamer, mon Dieu, Poutine n’est pas Dieu soi-même, il oeuvre dans ses intérêts ( les siens, pas ceux de la Russie ; petit aparté : il semble impossible dorénavant aux occidentaux agréés, de concevoir qu’un chef d’État agisse pour son pays, ce qui nous prouve l’ampleur et la profondeur de notre décadence acceptée), la Chine et l’Iran sont des pays invivables, rendez-vous compte, c’est tellement mieux chez nous,etc. Ces beaux esprits, tellement aveuglés par les ors de la République, ne se rendent même pas compte que ce n’est pas de cela qu’il s’agit ! On pense ce qu’on veut de la société voisine et personne ne nous contraints à aller y vivre, mais quand on parle politique extérieure, quand bien même les peuples de l’empire seraient au paradis tandis que ceux d’ailleurs, ceux qui veulent mettre fin à ce conflit inique, vivraient en enfer, ce n’est pas le propos ! Et pourtant, on répond, mais ce n’est pas le paradis ici, ou/et ce n’est pas l’enfer là-bas ! Nous devrions faire un petit effort pour rester dans le sujet et même si nous avons une bile à déverser, le faire à propos !

Pour en revenir au racisme, je voudrais parler des traumatismes, souvent minimes, mais même plus profonds, enfin, qui n’autorisent pas l’amalgame. Cela me fait penser à ces gens qui ont passé leur vie avec la phobie des araignées, ou la peur des chiens parce qu’ils auraient été piqués ou mordus, un jour lointain de l’enfance, par l’une de ces bêtes. C’est faux ; ce qui traumatise, c’est l’état psychologique, d’abandon, de solitude, de crainte, dans lequel ces événements ont eu lieu. Car pour sortir du traumatisme, nous avons un bel outil : le mental, qui là, pour une fois, est d’un grand recours ; et je sais de quoi je parle, moi qui ai eu des pulsions totalement inconscientes et irrationnelles de paranoïa, suite à mes traumatismes. Ces traumatismes qui ne m’ont jamais rendue encline à mettre dans le même sac tous les flics, ou les juges ou les avocats ou les greffiers !! Mais en revanche m’ont fragilisée au point de devoir traverser une période qui sera sûrement encore longue, où la moindre sonnerie du téléphone me donne des sueurs froides, où le moindre papier dans ma boîte aux lettres présage des ennuis sans fin.

Le racisme, est une manière de régler un problème, de la manière la plus nocive qui soit, pour soi d’abord, pour les autres peut-être, sans avoir commencé la moindre quête de compréhension et de mise en lien, le moindre soin d’un corps affaibli et apeuré, la moindre approche de notre condition de vie sur terre et surtout, la moindre perspective d’avenir avec, comme bagage, cette fermeture.

Nous pourrions nous en tenir à : j’aime ce que je rencontre, je laisse passer ce qui m’indiffère, je suis curieuse de ce qui m’attire et, surtout, je suis curieuse de ce qui m’advient.

Faisons preuve de discernement, déjà, il paraît que c’est l’apanage de l’être civilisé. Je ne m’étendrai pas sur le fait que je crois ( et vois) exactement le contraire !!

Le racisme souvent, c’est une intolérance à la vie, à la liberté qui, certes, n’est pas restreinte par notre morale, morale élastique qui ressemble à l’étroitesse d’esprit.

Nous vivons dans un monde, tellement peuplé, que rien d’humain ne peut trouver sa place ; aucune exception ne peut être faite – de peur de dérives, je dis : de peur d’être débordé. Et pourquoi ? Parce qu’ils veulent tout maîtriser et cette volonté de maîtrise s’est ancrée dans toutes les demeures, dans tous les cœurs ! Et c’est complètement paradoxal dans une société qui par ailleurs vante l’individu et la liberté. Il n’y a plus aucune souplesse, aucune empathie, aucune possibilité de sortir des carcans des lois – faites par qui ?- ; il ne reste que la lâcheté, c’est lâche, c’est souple, la cécité, le mensonge et l’hypocrisie, le « deux-poids-deux-mesures » qui enrage tout le monde, ne satisfait personne. Dans les marécages chacun trouve ses cailloux pour avancer quand même mais rien n’est commun, rien n’est acquis et dans ces cas d’extrême disette, celui qui rassemble, c’est l’autre à ce point autre que rien ne peut le rattraper.

Mais le racisme est une certitude, comme la croyance, comme la conviction ; aucune parole ne peut le déboulonner, juste, peut-être, une expérience intime, une compréhension comme une illumination qui soudain abat les murs qui nous enfermaient.

C’est une certitude qui aujourd’hui s’habille d’arguments, de chiffres, de graphiques, de rapports, tout alibi qui ne cherche aucune cause, aucune explication, aucune mise en relation des faits, des causes et des effets.

Et puis, il y a le racisme contraire, celui que l’on trouve dans la loi : il est interdit de médire, de critiquer ; un juif est un juif et rien d’autre, si je l’insulte parce qu’il s’est montré odieux, je risque la prison ! Les musulmans, c’est une masse ; si je m’aventure à dire « sale bougnoule » à un type qui m’énerve, comme je dirais « sale mec », je ne risque pas grand chose ; mais attention, si vous dîtes « sale pétasse » en vous adressant à moi, je pourrais aller loin, dans un tribunal !! Mais si, mécréante, je fais des phrases sur la religion, je risque gros.

Non, la loi n’est pas d’un grand recours ! La seule chose qui pourrait aider, c’est trois minutes de réflexion, mais ça, il ne faut pas y compter : nous n’avons pas le temps.

Et puisque le prétexte de cet article est ce que j’ai lu sur Agoravox ces derniers jours, je voudrais terminer comme ça :

Les Gitans à Moirans ; quelque chose me chiffonnait. Je ne lis jamais rien des actualités telles qu’elles nous sont données ; je les lis ici dans l’interprétation des uns et des autres.

Émeutes : avons-nous déjà vu des Gitans, des tziganes, des Roms, tiens si vous y tenez, faire des émeutes ? Quelque chose de flou m’énervait : on a dit que j’ai pété les plombs, que j’ai agressé.

J’étais énervée en colère oui, de voir tout ce beau monde qui m’entoure sur l’écran réclamer plus de répression. Un commentaire donnait un lien censé me faire voir et admettre les choses. Or ce lien, justement, m’expliqua tout le contraire :

Un casseur dit avoir été intrigué par des personnes sur la route, devant chez lui, qui brûlaient des pneus, puis, n’en ayant plus, venir lui en demander. Vous avez bien lu : « demander » ;

Sa réaction, appeler les flics ; avant que ceux-ci ne se bougent, une autre bande, beaucoup plus importante, de gens cagoulés, est arrivée ; ces gens sont rentrés dans sa casse, ont piqué sa voiture, la voiture de sa femme, le manitou, des pneus en pagaille. Ils ont volé. Ils ont brûlé. Et comme le gus s’était enfermé dans son bureau avec la femme et son ouvrier, ils les ont enfermés. La femme était choquée. Je ne veux pas en rire, je sais ce qu’est un état de choc.

Ma conclusion est claire : les cagoulés ne sont pas des gitans.

Les gitans ne sont pas des émeutiers. Les Gitans ne se cagoulent pas. Et un autre commentaire disait que les Gitans ne brûlent pas les voitures, si pleines de trésors à monnayer.

Voilà, encore une belle façon d’attiser le racisme ; peuple contre peuple.

Et ça marche, ça continue à marcher.

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