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28 mars 2024

Shimon Pérès, le nucléaire israélien et « l’option Samson »


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LE MONDE | Par Laurent Zecchini – Jérusalem, correspondant

Si Israël était menacé de destruction, faudrait-il qu’il ait recours à l' »option Samson » ? A cette question, posée par Gil Kopatch et Shani Keinan, producteurs d’un film pas encore diffusé retraçant sa vie, le président israélien, Shimon Pérès, répond avec une surprenante franchise : « L’objectif de ces réacteurs [nucléaires] est d’empêcher la destruction [d’Israël], et jusqu’à maintenant, cela a bien fonctionné. J’espère que cela continuera à fonctionner à l’avenir. »

L' »option Samson » est un secret de Polichinelle jusque-là bien gardé : la capacité d’Israël à utiliser ses armes nucléaires. Dans la Bible, Samson fait s’écrouler les colonnes du temple philistin, dont le toit écrase ses ennemis et lui-même. L’Etat juif n’a jamais admis posséder l’arme atomique. Il a appliqué une doctrine dite d’« ambiguïté nucléaire« .

Les propos de M. Pérès, qui ont été publiés par le quotidien Yediot Aharonot, ne laissent pas grand-chose de cette « ambiguïté ». Est-ce une indiscrétion calculée au moment où la perspective d’un Iran doté d’armes nucléaires se renforce ? Toujours est-il que, dans ce film, le président israélien raconte avec des détails inédits la genèse de l’aventure nucléaire dans laquelle s’est lancé l’Etat juif dans les années 1960.

« LEUR DOUTE EST NOTRE FORCE »

Shimon Pérès est l’un des architectes du programme nucléaire israélien, qui s’est développé avec deux centres de recherche nucléaires : celui de Sorek (près de la ville de Yavneh, au sud de Tel-Aviv), et celui de Dimona (dans le Néguev, au sud-est de Bersheba). C’est David Ben Gourion, le fondateur de l’Etat d’Israël, qui a pris la décision initiale.

« Au début, explique Shimon Pérès, il pensait que ce pourrait être une source d’électricité, pour un usage civil. On lui a dit que nous avions des matériaux radioactifs dans les sources chaudes du lac de Tibériade. » Tous les scientifiques de l’époque, sauf un, étaient contre, ainsi que les chefs du Mossad (le renseignement extérieur) et de l’armée. Ils pensaient que « le monde ne laisserait pas faire » Israël, et qu’un tel programme nucléaire assécherait les finances de l’Etat. Finalement, celui-ci a été lancé grâce à une souscription financière.

« Au bout du compte, je crois que nous avons recueilli 100 millions de dollars pour construire les réacteurs, ce qui doit correspondre à plus de 1 milliard de dollars d’aujourd’hui », indique Shimon Pérès. Le président israélien explique que, à l’époque, il en était arrivé à la conclusion qu’Israël devait se lancer dans le nucléaire, parce que « cela pouvait être la seule compensation à la petite taille » du pays.

« Ma conclusion, indique-t-il, était que nous ne pouvions pas changer la volonté d’attaquer, mais que nous pouvions changer la capacité d’attaquer. En d’autres termes, nous pouvions créer ce qu’on appelle la “dissuasion”. »

« Nous devions créer cette dissuasion que les autres n’avaient pas », ajoute-t-il. Sans jamais parler d’« arme nucléaire », Shimon Pérès précise qu’il a été décidé de construire le réacteur de Sorek dans la transparence, alors que celui de Dimona a été construit secrètement.

Le président israélien répond enfin à la question de savoir ce qu’est exactement l’option nucléaire : « C’est le fait que la plupart de nos voisins, qui veulent nous détruire, croient qu’Israël a la capacité de les détruire. Leur doute est notre force. »

Selon l’organisme réputé Arms Control Association, Israël disposerait aujourd’hui d’un arsenal nucléaire compris entre 75 et 200 armes. Celles-ci, selon plusieurs experts, pourraient être utilisées avec trois vecteurs différents : les missiles balistiques israéliens Jéricho; des avions de combat à capacité nucléaire F16 et F15; enfin, des missiles tirés par les trois sous-marins de la classe Dolphin (de fabrication allemande) dont dispose l’Etat juif.

Laurent Zecchini – Jérusalem, correspondant

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