Conditions de vie déplorables, agressions et abus sexuels sont le quotidien des réfugiés-détenus sur l’île de Nauru. 2.000 rapports d’incidents, jusqu’ici restés secrets, ont été publiés par le Guardian.

Au large de la Papouasie et de la Nouvelle-Guinée, la plus petite république du monde mesure 21 km2. L’île de Nauru aurait pu être une destination de vacances exotiques. Elle est en fait utilisée par le gouvernement australien comme un camp de rétention offshore géré par une société privée Wilson Security. Les migrants qui ont tenté sans succès de rejoindre l’Australie en bateau y sont exilés.

Agressions, violences sexuelles, auto-mutilations et mauvais traitements y sont le quotidien des réfugiés, et plus particulièrement des enfants. Alors que les autorités australiennes mettent tout en oeuvre pour garder ces conditions de détention secrètes, 2.116 rapports d’incidents, rédigés par le personnel du centre de rétention de l’île, ont été publiés par le Guardian ce mardi.

Les enfants en première ligne

Ecrits entre mai 2013 et octobre 2015 par le personnel du camp, des enseignants et des gardes, ces rapports d’incidents jettent une lumière crue sur les conditions de détention des réfugiés. Alors que les enfants ne représentent que 16 % des détenus, ils sont l’objet de plus de la moitié de ces messages.

Différents rapports d’incidents font état d’abus sexuels auprès des enfants du camp, notamment de la part de certains gardes. Plus généralement, c’est le mal-être des détenus qui est frappant et révélateur de leur traumatisme. Certains enfants affirment déjà ne plus vouloir vivre. Un couple aurait demandé à mourir pour que leur futur bébé soit envoyé en Australie.

La partie visible de l’iceberg

Suite à la publication de ces documents, 26 anciens employés du camps se sont réunis pour évoquer publiquement les traumatismes qui ont lieu à Nauru et appeler à la fermeture du centre. Selon Jane Willey, ancien enseignant du camp, les faits révélés par ces rapports ne sont que la partie visible de l’iceberg. Ils ajoutent que le personnel auteur de ces rapports d’incidents était souvent mis en examen par Wilson Security, et parfois rétrogradés.

La révélation de ces faits était notamment empêchée depuis 2015 par l’Australian Border Force Act, qui impose jusqu’à deux ans de prison aux personnes coupables de « divulgations non autorisées ». Les journalistes étrangers ne sont pas non plus les bienvenus sur l’île : une demande de visa coûte 8.000 dollars, et reste souvent sans réponse.

La solution du Pacifique existe depuis 2001

En exilant ses réfugiés sur ces îles, l’Australie espère dissuader les demandeurs d’asile de rejoindre ses côtes et retarder le traitement de leur demande de statut de réfugié politique. Cette politique d’immigration, aussi appelée « Solution du Pacifique », existe en fait depuis 2001. A l’époque, le cargo norvégien « Tampa » avait porté secours à un bateau de pêche indonésien transportant des migrants, que l’Australie avait d’abord refusé d’accueillir. Le pays a finalement demandé aux Etats du Pacifique de les prendre en charge, à condition que les coûts impliqués et la construction de camps soient endossés par les autorités australiennes. Nauru et Manus étaient les deux îles choisies. Pour Nauru, très appauvrie depuis les années 1990, cela représentait de nombreux emplois.

En 2014,un reportage vidéo a été diffusé par Spicee

Les camps ont été fermés en 2007 par le gouvernement travailliste australien, qui les considérait trop inhumains. Ils ont finalement repris du service lorsque l’Australie a été confrontée à un afflux de migrants trop important en 2013. Ironie de l’histoire, tout ceci coûte des milliards de dollars à Canberra.