La corrida contre-terroriste qui oppose l’occident et l’islam
19 août 2016
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«… La guerre en Tchétchénie a montré que les russes peuvent tuer une quantité de wahhabites. Mais seuls les musulmans peuvent tuer l’idéologie wahhabite.» The Saker
Saker US
Par The Saker – Le 8 août 2016 – Source thesaker.is
Dans nombre de mes articles précédents, j’ai tenté de montrer que les terroristes qui ont commis les atrocités récentes aux États-Unis, en Europe et ailleurs n’étaient vraiment pas du tout motivés par des valeurs islamiques et que les dirigeants de l’Empire anglosioniste essaient de créer un récit de choc des civilisations, dans lequel le monde occidental et le monde musulman sont en train d’entrer en collision.
La façon dont ils le font est simple : ils identifient des individus psychologiquement faibles, les types dont les sectes religieuses ont toujours fait leur proie, puis ils leur fournissent une mince couche de pseudo-islam pour rationaliser leur aliénation et leur donner un prétexte idéologique pour attaquer et assassiner des membres de la société qu’ils haïssent tant. Ma preuve est simple : si vous observez ce que nous découvrons sur les auteurs, vous verrez que ce sont typiquement des gens pratiquant la promiscuité sexuelle, souvent des homosexuels, qu’ils boivent, recourent à des prostitué(e)s et s’engagent dans de nombreuses activités catégoriquement interdites dans l’islam. En plus, dans la plupart des cas, les auteurs de ces crime n’ont même pas un niveau d’éducation intermédiaire à l’islam et leur islamisme nouvellement découvert est soit trouvé dans les médias sociaux, soit le résultat d’un éventuel voyage dans un pays musulman. Bref, ces prétendus terroristes islamistes ne sont pas tant des musulmans que votre genre habituel, votre variété locale de perdants mal adaptés, de types frustrés et malheureux, affligés d’un psychisme faible et d’un désir de vengeance.
Chaque fois que j’ai écrit ça, j’ai été accusé de blanchir l’islam ou de nier l’évidence : que l’islam est agressif et une menace pour le monde occidental. La première forme est une accusation ad hominem assez brutale, utilisée pour éviter de discuter du problème et le réduire totalement à mes prétendues sympathies à l’égard de l’islam. Et puisque les accusations ad hominem ne peuvent pas être contestées logiquement, je me concentrerai plutôt sur la seconde : que l’islam est une menace pour le monde occidental.
Commençons par quelques notions de base. L’islam est une religion extrêmement diverse, qui a été adoptée au fil des siècles dans des pays allant du Maroc à l’Indonésie. Parler d’islam sans y ajouter un qualificatif plus précis est tout simplement absurde. De même qu’il serait ridiculement injuste de mettre dans le même sac les chrétiens orthodoxes et les croisés papistes (ne serait-ce que parce que les premiers ont aussi été victimes des seconds), il est ridiculement abusif de mettre les fous takfiris de Daech ou d’al-Qaïda dans le même sac que, disons, les chiites (ne serait-ce que parce que, dans ce cas, ces derniers ont été victimes des premiers).
En outre, le genre d’islam militant que nous affrontons aujourd’hui est une variante tout à fait unique et distincte de l’islam. Comme je ne suis pas moi-même musulman, je pourrais bien me tromper dans mes conclusions (lecteurs musulmans, corrigez-moi si nécessaire, s’il vous plaît !), mais autant que je puisse le dire, le genre d’islam militant qui inspire al-Qaïda, Daech et les autres cinglés takfiris a ses racines dans l’idéologie de Mohammed ibn Abd al-Wahhab et Mohammed ibn Saoud, qui ont tous deux posé les fondations de l’État saoudien. Et tandis que cette idéologie, le wahhabisme, emprunte des éléments aux enseignements du savant du XIVe siècle Ibn Taymiyyah, elle était, du moins au début, limitée aux diverses tribus vivant dans la péninsule Arabique et n’avait que très peu d’influence sur le reste du monde musulman. En d’autres termes, le wahhabisme était un phénomène local limité à la péninsule Arabique, au moins jusqu’à ce que les Américains décident de la déchaîner contre les Soviétiques en Afghanistan (davantage à ce sujet ci-dessous).
Le second type d’islam qui a inspiré diverses organisations terroristes en Afrique du Nord et au Moyen-Orient est basé sur les idées de Sayyid Qutb, un écrivain égyptien dont les idées ont eu une influence majeure sur les Frères musulmans, qui jouent aujourd’hui un rôle important dans de nombreux pays comme l’Égypte, la Turquie et de nombreux autres. Certains ont tenté de relier ce que j’appellerais le qutbisme aux Kharidjites du IXe siècle, mais cela me semble exagéré : le qutbisme est une idéologie très moderne, développée en réaction à l’État moderne laïque.
Il y a plusieurs différences majeures entre le wahhabisme et le qutbisme (comme par exemple le fait que le premier est profondément réactionnaire et le dernier beaucoup plus progressiste), mais leur caractéristique commune essentielle est qu’ils sont tous deux profondément révolutionnaires. C’est l’une des choses qui sont le plus souvent négligées : le zèle révolutionnaire du wahhabisme et du qutbisme est principalement dirigé vers les pays et les sociétés musulmanes existantes et non vers le reste du monde.
Je dirais qu’exactement de la même manière que le virus Ebola a existé depuis longtemps dans les grottes des chauve-souris du Kenya, le virus wahhabite est resté confiné dans les déserts du Royaume d’Arabie saoudite, jusqu’à ce que certains esprits particulièrement déments aux États-Unis (emmenés par Zbigniew Brzezinski, un authentique maniaque) aient décidé de lâcher le virus wahhabite contre les Soviétiques en Afghanistan.
Voici ce que la CIA a fait : elle a 1) fédéré divers groupes musulmans extrémistes en un seul mouvement 2) elle a utilisé l’argent et la propagande saoudienne pour les organiser et 3) elle leur a donné des armes. Beaucoup d’armes.
Aparté :
Le récit officiel est que le plan a marché et que la CIA a expulsé les Soviétiques d’Afghanistan. Personnellement, je ne gobe pas du tout ça. Non seulement les combattants de la liberté de Reagan étaient incapables de battre l’armée soviétique, cela leur avait pris quatre longues années pour finalement faire tomber Mohammad Najibullah (1992) bien que le retrait des Soviétiques (1988) l’ait laissé complètement seul. Quant aux talibans, ils n’ont saisi Kaboul qu’en 1996. Non, ce qui a contraint Gorbatchev à ordonner un retrait des forces soviétiques d’Afghanistan était le chaos total à l’intérieur de l’Union soviétique, et pas la prouesse militaire des Afghans. Mais comme la CIA voulait le mettre au crédit de la victoire, c’est comme ça que l’Occident a décidé de se souvenir de cet événement.
Ce qui est certain, cependant, est que la guerre en Afghanistan a vraiment fédéré, pour la première fois, de nombreuses variétés d’extrémistes islamiques qui se sont convaincus eux-mêmes qu’ils avaient vaincu l’ours russe, puis ont décidé d’affronter à la fois les régimes établis du monde musulman (baathistes ou chiites) et les infidèles occidentaux. Le problème, cependant, était que les infidèles occidentaux étaient très loin et avaient beaucoup de puissance militaire à leur disposition pour affronter les takfiris. Donc les takfiris ont décidé de ne combattre que les faibles :
1) Les Russes en Tchétchénie pendant les années Eltsine (avec le soutien secret des Anglosionistes et la plus grande partie du monde musulman)
2) Les Serbes en Bosnie (avec le plein soutien de l’OTAN et la totalité du monde musulman)
Notez que lorsque Poutine est arrivé au pouvoir, les wahhabites ont été vaincus en Tchétchénie, et qu’en Bosnie (et plus tard au Kosovo), les wahhabites ont été incapables de vaincre les Serbes et ont dû compter sur l’intervention armée massive de l’OTAN. En fait, il est rapidement apparu que les takfiris ne pouvaient remporter des succès que lorsqu’ils étaient soutenus par la puissance directe des États-Unis et de l’OTAN (en Libye, en Syrie). Ce qui se rapproche le plus d’un succès militaire obtenu par ces takfiris, c’est en Irak, lorsqu’ils ont pu capitaliser sur le conflit sectaire découlant du renversement de Saddam Hussein. Quant à la Syrie, Daesh a eu le soutien total des États-Unis, de l’Union européenne, de la Turquie, du Qatar, de l’Arabie saoudite et de tous leurs mandataires.
Pourquoi tout cela est-il important?
Pour deux raisons : premièrement, nous devons réaliser que la menace que nous affrontons n’est pas l’islam en soi, mais seulement une petite sous-section du monde islamique. Deuxièmement, que cette sous-section profite du reste du monde musulman, en particulier lorsqu’il est déjà affaibli par une intervention militaire occidentale.
Comprendre une menace ne signifie pas la minimiser. La menace wahhabite est réelle et elle s’accroît à chaque année qui passe, parce que l’Occident continue à vouloir l’utiliser contre ces pays qui refusent d’être soumis à l’Empire anglosioniste. Pire même, les dirigeants de cet Empire utilisent maintenant les fous wahhabites, pour créer dans leurs propres pays une crise qu’ils voient comme un moyen de préserver l’ordre politique actuel. Autrement dit, le vrai problème ce n’est pas les wahhabites, mais les dirigeants de l’Empire anglosioniste, qui les utilisent à l’intérieur et à l’extérieur de l’Empire. Ce qui rend cette menace encore plus dangereuse est que le wahhabisme érode maintenant l’islam traditionnel dans de nombreuses parties du monde. En fait, la plupart des pays musulmans font face aujourd’hui à une menace révolutionnaire wahhabite, cadeau des Saoudiens, bien sûr, mais aussi de leurs patrons anglosionistes qui n’entreprennent aucune action efficace pour combattre le terrorisme, qui ne concèdent que du bout des lèvres la nécessité de ne pas tout condamner de l’islam, mais dont la machine de propagande martèle en permanence le message que l’islam, tout l’islam, est une menace pour le monde occidental et la démocratie.
En refusant de distinguer entre les takfiris et le reste du monde musulman, l’Empire provoque constamment les 1.6 milliards de musulmans dans le monde, même si ces musulmans, dans leur immense majorité, ne sont pas seulement sans lien avec une forme quelconque de wahhabisme, mais sont aussi les victimes principales des atrocités et des attaques terroristes wahhabites. Les diverses formes d’islam traditionnel dans le monde sont aujourd’hui soumises à une double menace : d’une part celle des cinglés wahhabites et de leurs patrons saoudiens et, d’autre part, celle de la guerre culturelle/idéologique que l’Occident mène actuellement contre l’islam, en tant que religion et modèle de civilisation.
Ce qui est pénible est que le wahhabisme ne pourra être vaincu que par une approche exactement opposée : un effort généralisé pour éradiquer les terroristes takfiris et un grand effort pour favoriser, et même protéger, les formes non wahhabites d’islam traditionnel. C’est exactement ce que Poutine et Kadyrov ont fait en Tchétchénie et ce que Assad tente maintenant de faire en Syrie. Mais cette stratégie implique une rupture fondamentale dans la manière de penser, du moins pour les Occidentaux, puisqu’elle est centrée sur deux choses que l’Occident refuse catégoriquement de faire :
1) Tuer autant de terroristes takfiris que possible (plutôt que d’essayer de les utiliser contre des ennemis présumés)
2) Accepter que l’islam traditionnel est la défense unique et la plus importante contre le takfirisme.
La guerre en Tchétchénie a montré que les Russes peuvent tuer une quantité de wahhabites. Mais seuls les musulmans peuvent tuer l’idéologie wahhabite.
Aucune des choses mentionnées plus haut n’exige l’adhésion ou la sympathie pour l’islam. Je suggère que cette logique directement pragmatique indique clairement que la pire manière de lutter contre le wahhabisme est de proclamer que l’islam dans son ensemble est le problème. En réalité, le virus mortel wahhabite a infecté le corps de l’islam et se développe en son sein. Si ce processus continue, le corps de l’islam traditionnel mourra tout simplement et sera remplacé par une pandémie wahhabite qui sera beaucoup, beaucoup plus dangereuse pour la planète tout entière. Parce que, ne vous y trompez pas, le wahhabisme est une menace mortelle pour tout le monde, musulman ou non, et c’est une force avec laquelle on ne peut pas négocier. Lorsque Sheikh Hassan Nasrallah, du Hezbollah, parle des fous wahhabites comme de shaitans (démons) il a tout à fait raison. Lorsque les terroristes modérés exécutent un garçon de 12 ans et utilisent des armes chimiques contre des civils, il devient littéralement impossible d’imaginer ce que les durs pourraient être capables de faire.
L’Occident est à la croisée des chemins : il peut soit déclencher une sorte de guerre choc des civilisations contre l’ensemble du monde musulman et perdre cette guerre, soit enfin revenir à la raison et réaliser que la seule chose qui se tient entre lui et les takfiris est le monde musulman traditionnel. De toute façon, la Russie se portera beaucoup mieux, non seulement parce que ses services de sécurité et ses forces spéciales ont aujourd’hui une expérience totale de plus de 35 ans avec les cinglés takfiris, mais aussi parce qu’elle peut compter sur sa population musulmane pour être à l’avant-garde de l’État russe et du véritable islam. En revanche, l’Occident anglosioniste a agi de façon à s’aliéner la plupart des musulmans et il ne peut compter que sur ses patrons israéliens pour l’aider (avec des amis comme ceux-ci, qui a encore besoin d’ennemis, de toute façon ?).
Je suppose que ceux qui haïssent inconditionnellement l’islam me qualifieront de toutes sortes de noms et m’accuseront, de nouveau, d’être un propagandiste musulman. Très bien. À ceux-là, je peux seulement dire : « Réjouissez-vous de votre guerre perdue contre une religion tout entière ! » À ceux encore capables de penser droit, je suggère l’évidence : le taureau dans une corrida meurt parce qu’il gaspille ses forces et son énergie à essayer de combattre un bout de chiffon rouge au lieu d’encorner le torero qui l’agite.
Vous êtes le taureau. Le chiffon rouge est la description de l’islam par les anglosionistes. Le matador est l’Empire anglosioniste. À vous de jouer.
The Saker
Traduit par Diane, vérifié par jj, relu par Catherine pour le Saker francophone