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25 avril 2024

Irak : la communauté noire dénonce sa  »marginalisation » + Les Zang ou la révolte des esclaves, par Gilles Munier


Publié par Gilles Munier sur 5 Juin 2022, 07:26am

Catégories : #Irak

Par la rédaction d’Africanews (2/6/22)*

Zubair, près de Bassora, à l’extrême sud de l’Irak, cette ville abrite la communauté noire du pays, des descendants d’esclaves originaires d’Afrique de l’Est. Cette minorité irakienne compte entre 250 000 et deux millions de personnes selon des estimations informelles. Une couche marginalisée depuis des lustres.

« Aujourd’hui, les membres de la communauté noire d’Irak sont au bas de l’échelle économique du pays. De nos jours, nous sommes confrontés à de nombreuses difficultés économiques, il y a par exemple un taux de chômage élevé au sein de la communauté noire. », explique Majed al-Khalidy, militant au sein de la communauté noire, employé dans une compagnie pétrolière à Bassora.

Avant d’ajouter : « Nous demandons au gouvernement irakien, d’inclure des représentants de la communauté noire et de fixer un quota pour eux. Depuis la création de l’État irakien, nous n’avons pas vu quelqu’un de la communauté occuper de hautes fonctions dans l’État. Nous n’avons pas vu un gouverneur, un ministre ou un législateur. »

Seule la musique héritée des ancêtres aide à redorer l’image de cette communauté. L’art a rendu célèbre la ville Zubair.  » Ce [zaffa] est quelque chose dont nous avons hérité…. Certains disent que c’est leur seule compétence… Et d’autres le font parce qu’ils en ont hérité, cependant, la majorité de ces [troupes] se trouvent à Zubair. Il y a d’innombrables groupes ici. ». a déclaré Adnan Abdelrahman, percussionniste irakien.

En 2007, le Free Iraqi Movement, organisation défendant les droits de cette minorité a été créé. Son fondateur a été tué 6 ans plus tard.

*Source : Africanews

**Les Zang ou la révolte des esclaves

Par Gilles Munier (Guide de l’Irak – 2000)***

Le sud de l’Irak fut troublé au 9ème siècle par une des plus importante révolte d’esclaves connue, avec celle de Spartacus.

Des esclaves noirs travaillaient par milliers sur des exploitations agricoles ou des chantiers du Chatt al-Arab, particulièrement insalubres. On les appelait les Zang, car ils étaient pour la plupart originaires des côtes d’Afrique orientale, notamment du « Zangzibar » (Zanzibar). Vivant dans des conditions déplorables, ils se soulevaient sporadiquement, favorisés par la nature du terrain, propice à la guérilla. Le Maysan est une région marécageuse couverte de roseaux, quadrillée par de nombreux canaux.

Ali Ben Mohamed, le chef de la « récolte des esclaves » était un Arabe né à la frontière persane. Très intelligent, passionné d’astronomie et de sorcellerie, il avait été poète officiel à la cour du calife Al-Muntasir, à Samarra. Puis, il s’était installé à Bahreïn en 863. Grand orateur, ambitieux, il s’y faisait passer pour un descendant d’Ali, voire comme prophète.

Sa première tentative « révolutionnaire » échouera. Trop peu nombreux ses partisans (des bédouins qu’il avait convaincus de renverser le calife) subiront une sévère défaite.

Réfugié à Bagdad, il prétendra posséder des dons surnaturels, notamment celui de lire dans les pensées de ses adeptes. Apprenant que des troubles secouent Bassora, il s’installera en bordure des marais, envoyant des agitateurs inciter les esclaves à la révolte.

En 869, lors d’une grande réunion, il promet au Zang d’améliorer leurs conditions de vie, leur richesse et de ne jamais les trahir s’ils le suivent. La révolte fera trembler toute la région.

Les rebelles Zang se compteront bientôt par milliers. Ils pilleront Wasit et Bassora, dont ils massacreront les habitants. Soutenus par des bédouins qui les ont rejoints, ils ont perturbé le pèlerinage à La Mecque, à cause de l’insécurité qu’ils faisaient régner. Une tentative d’alliance avec les « communistes » qarmates (soulevés eux aussi contre le pouvoir central) échouera de justesse.

Les Zang seront vaincus par Abdul Abbas en 883. A la vue de la tête de leur chef plantée sur une lance, ses partisans se rendront par milliers. Les chefs de la révolte seront crucifiés. Mais il faudra deux ou trois ans pour que les troubles cessent. De nombreux Zang se réfugieront dans les marais où ils se livreront au brigandage.

***Ed. Jean Picollec, Paris – 2000 et Interlink Books (USA – 2004) – Photos : Erick Bonnier

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