Le partenariat gagnant-perdant ou le mirage des IDE (ou le bradage des aciéries d’El-Hadjar)
9 août 2016
Par Abdelatif Rebah
Dans un article brossant, au début des années 2000, le bilan de l’investissement étranger en Europe de l’Est, l’économiste Catherine Samary résume ce qu’en attendent généralement les pays récepteurs : « des technologies et du savoir-faire, des financements qui ne sont pas des dettes, des créations d’emplois et des capacités d’exportation»[1]. On peut affirmer qu’en Algérie, également, on n’en attendait pas moins, si on exclut les financements que les responsables algériens ont toujours tenus pour l‘aspect secondaire de la question[2]. On attend de l’IDE qu’il joue le rôle de vecteur d’implantation de nouvelles méthodes de gestion et de nouvelles modalités d’organisation, des manières de faire et des standards internationaux en matière de gestion et d’éthique des affaires, d’ amélioration de la formation de la main d’œuvre existante ainsi que d’acquisition et de diffusion de compétences techniques, enfin, qu’il apporte connaissances spécialisées et savoir-faire, incorporation de nouveaux intrants et de nouvelles technologies [3]. Cette vision plutôt idyllique du rôle de l’IDE projette la mise en commun des compétences et des capitaux entre les deux rives au travers de prises de participation, de joint venture et de filiales en vue de créer des segments compétitifs étroitement intégrés dans les structures industrielles de l’Europe [4]. Tout comme pour les gouvernants des pays de l’Est, pour ceux de l’Algérie, ces IDE sont « supposés tout bénéfice ». Le bilan est loin, cependant, de le confirmer.
Partenariat Sider-Arcelor Mittal : la sidérurgie algérienne dupée plutôt que dopée
Dès 1964, était lancé le travail de conception d’un programme d’envergure de développement de la sidérurgie algérienne considérée comme l’infrastructure de l’industrialisation, par excellence. La mise en place du potentiel sidérurgique et métallurgique national va absorber le cinquième de l’investissement industriel hors hydrocarbures réalisé durant la période 1967-1989, un montant estimé à 11 milliards de dollars (à prix constants de 1984)[5]. Ainsi, en deux décennies pratiquement, était érigé un immense potentiel technologique, dont le complexe d’El Hadjar constituait le cœur battant, faisant de l’Algérie le premier pays du Maghreb à se confronter aux défis de la maîtrise de la production sidérurgique des trois filières, produits plats jusqu’à l’acier étamé, produits longs et tubes sans soudure.
La construction du complexe d’El Hadjar avait également impulsé la création d’une infrastructure de recherche et de formation de qualité. L’Algérie s’enrichissait d’un centre de recherche métallurgique et d’un appareil de formation composé de l’Institut des mines et de la métallurgie de Sidi-Amar, au-dessus du complexe d’El-Hadjar, qui a servi de site initial à l’université d’Annaba, d’un Institut de soudure, d’un centre de formation d’ingénieurs d’application pour compléter la formation des techniciens supérieurs, d’un centre de formation de techniciens et agents de maîtrise et d’un centre de formation d’ouvriers qualifiés.
La réalisation du complexe sidérurgique avait donné naissance aussi à trois entreprises d’engineering Ensid, Sidem et Sersid installées respectivement à Oran, à Alger et à Annaba afin de capitaliser toutes les expériences en matière d’études et de réalisation des installations d’El-Hadjar et des usines de première transformation de produits sidérurgiques ainsi que de gaz industriels.
Le 24 février 1969 était mis en production le complexe d’El Hadjar. Sa capacité initiale de 1500 tonnes/jour d’acier sera portée, dix ans après, à 3500 tonnes/jour avec l’inauguration en 1980 du deuxième haut fourneau. En 1989, l’industrie sidérurgique algérienne, avec une capacité installée de 2 millions de tonnes, couvrait 50% de la demande nationale en acier[6]. Dotée d’un taux d’encadrement largement supérieur à la moyenne nationale de l’industrie, elle représentait un potentiel de qualification de plusieurs milliers d’ingénieurs, de techniciens et d’ouvriers professionnels et expérimentés.
Durant les années 1990, à l’instar des autres branches de l’industrie, la sidérurgie va payer son tribut au programme d’ajustement structurel du FMI et autres conséquences économiques et sociales du rééchelonnement. La production sidérurgique va accuser un net recul par rapport à la moyenne des années 1980 : – 22% pour la fonte liquide en poche, – 26% pour l’acier brut, -70% pour le rond à béton, – 46% pour les tubes d’acier soudés, -17% pour les tubes sans soudure[7]. Quant aux effectifs, ils chuteront de 22 000 à 12 000 à la veille de la privatisation d’El Hadjar[8]. Face à cette dégradation continue, direction et syndicats du complexe vont tirer, à maintes reprises, la sonnette d’alarme. Dans la deuxième moitié des années 90, en effet, les importations de produits sidérurgiques principalement ukrainiens, pourtant réputés irradiés suite à la catastrophe de la centrale nucléaire de Tchernobyl, mais à prix cassés, se sont multipliées du fait des barons de l’import-import alors que la production nationale, elle, ne s’écoulait plus. Les banques, de leur côté, refusaient d’accorder à l’entreprise sidérurgique les moyens de réhabiliter son outil de production notamment la chaîne du complexe d’El Hadjar, ou bien bloquaient le financement des programmes de modernisation et même l’approvisionnement de certaines unités de production. Le complexe est, alors, acculé à une sous-production et certaines chaînes à des arrêts[9]. C’est l’asphyxie. Le fleuron de l’industrie algérienne finit la décennie 1990 sur une note catastrophique. Le complexe d’El Hadjar ploie sous les dettes et les découverts et la direction du groupe Sider inaugure l’année 2000 en annonçant que l’entreprise était en cessation de paiement. Les signaux de détresse vont se répéter tout le long de l’année 2000. Fin septembre, on apprend que les installations d’Alfasid, le cœur du complexe, pourraient être contraintes à l’arrêt dans un délai de un mois ce qui conduirait à la mise au chômage technique ou définitif de plus de 10 000 salariés. La production est au plus bas, Alfasid est endettée à hauteur de 6 milliards DA et est sommée par ses fournisseurs et ses partenaires d’honorer ses dettes[10]. Un mois plus tard, au sortir d’une réunion avec le ministre de la Participation et de la coordination des réformes (mais qui passe alors pour être le ministre chargé des privatisations), Hamid Temmar[11], la direction de l’entreprise, les représentants du Trésor et de la BEA et les syndicats, le président du holding Sidmines dévoilera les perspectives qui restaient à l’entreprise : « nous avons besoin d’une subvention immédiate de 5 milliards DA pour éviter la banqueroute, pour couvrir les dettes et garantir les salaires pour 6 à 7 mois, le temps de trouver un partenaire étranger». Le découvert d’Alfasid est de 13 milliards DA, celui de Sider, de 30 milliards DA. Des perspectives qui se résument, pour le syndicat, à la préservation de l’emploi et de l’outil de production.
La bouée de sauvetage
Rendue moribonde, l’entreprise n’a plus d’autre choix que d’accepter la privatisation comme une bouée de sauvetage. Elle en prend même les allures d’urgence signalée ! La décision de privatiser El Hadjar a été prise en 2000, un an plus tard, l’affaire était bouclée[12]. La signature du protocole d’accord intervient le 18 octobre 2001. Avec les 70% des actifs dans l’escarcelle, cet accord offrait au groupe indien Ispat International, le titre d’actionnaire majoritaire de la société algéro-indienne Ispat El Hadjar. Seules les unités du groupe Transolb et Alfatus manquaient à leur bonheur. « Vendue pour « une bouchée de pain », avec des engagements faciles à réaliser pour le repreneur, compte tenu du potentiel de développement », « privatisations au dinar symbolique », ces commentaires acerbes tranchaient avec la satisfaction qu’affichaient les responsables syndicaux du complexe pour qui «la voie semblait toute indiquée pour les entreprises en mal de trésorerie ou complètement à l’agonie de «retrouver une santé financière, seule garantie pour la préservation des postes d’emploi et l’augmentation de la production»[13]. Sur les montants exacts de même que sur les conditions dans lesquelles la cession s’est effectuée, il y a pratiquement absence d’information du public. Le qualificatif de dérisoire revient fréquemment quant au montant de la transaction, eu égard à la valeur réelle des installations et équipements de l’ordre de plusieurs milliards de dollars (la majorité des unités de production étaient encore performantes et de création récente, telles que la cokerie, les hauts fourneaux, les aciéries, les laminoirs, les tuberies). Au moment de la signature du contrat, en 2001, le bureau d’études français Roux avait évalué la valeur du patrimoine de la défunte Alfasid à 980 millions de dollars[14]. Sider apportait dans la corbeille offerte à l’Indien Ispat des avantages d’une valeur incommensurable[15].
Arcelor Mittal dispose à El-Hadjar d’un complexe de 800 ha parfaitement aménagé, doté de trois entrées-issues autonomes par voie ferrée et même d’une boucle ferroviaire permettant le déchargement en continu du minerai ou du charbon reçu par trains ; il y a aussi deux centrales électriques thermiques fonctionnant avec les gaz de récupération des hauts fourneaux et de la cokerie : ces deux centrales pourraient rapidement donner lieu à une centrale électrique à cycle combiné par l’adjonction de deux ou trois groupes électriques basés sur les turbines à gaz. Le complexe sidérurgique d’El-Hadjar dispose aussi d’une station de traitement et de recyclage de ses eaux usées d’un potentiel de production de 400 litres par seconde. De quoi assurer le fonctionnement autonome des hauts fourneaux et de la cokerie. El-Hadjar est conçu et dispose de toutes les infrastructures et utilités nécessaires à la production de 4 millions de tonnes d’acier. Ces disponibilités permettent, en outre, de réaliser ces capacités nouvelles en un temps record et à des coûts des plus compétitifs, avec les modules modernes de sidérurgie compacte, de la réduction directe de pellets de minerais de fer riches importés aux laminoirs de produits finis, il y a place à El-Hadjar pour installer deux modules de 1,5 million de tonnes chacun. Sider avait auparavant investi plus de 60 millions de dollars pour mettre à niveau le laminoir de produits plats laminés à chaud et surtout porté la capacité de l’aciérie électrique de 100 000 à 400 000 t/an avec une installation de coulée continue de billettes pour la production de ronds à béton. Dans les ateliers métallurgiques et mécaniques, un potentiel de fabrication mécanique lourde avec une forge pouvant forger et traiter thermiquement des pièces d’acier de 7 tonnes, tous les sous-ensembles des équipements de fabrication et de manutention pouvant y être réparés ou fabriqués. Ces installations devaient être intégrées à un vaste réseau d’usines grandes et moyennes pour la fabrication des biens d’équipement lourds nécessaires à la maintenance et au renouvellement des grandes industries locales.
De plus, ce qui avait été toujours refusé par les autorités aux gestionnaires algériens a été accordé au repreneur indien : la cession de la mine de fer d’El Ouenza et un minerai de fer bon marché, au moment où une forte demande sur le minerai de fer enregistrée sur le marché mondial entraînait une importante hausse des prix du transport maritime. Le groupe indien se voyait également épargné par les retombées de la flambée des prix pétroliers et donc du gaz naturel et de l’électricité. En effet, hormis le charbon importé de l’étranger, les autres sources d’énergie dont a besoin le complexe sidérurgique d’El-Hadjar, à l’exemple de l’électricité et du gaz naturel, sont vendues à Arcelor Mittal Steel à un prix considéré comme étant le moins cher sur tout le pourtour méditerranéen. La multinationale indienne obtenait aussi la couverture de l’APSI (Agence pour la promotion de l’investissement) c’est-à-dire l’exonération fiscale sur 10 ans et l’effacement de toutes les dettes d’Alfasid. Mittal va, également, hériter des stocks de matières premières, pièces de rechange, équipements et matériels, y compris ceux commandés, payés et non encore réceptionnés. Sur le plan commercial, le nouveau propriétaire majoritaire de l’industrie sidérurgique nationale avait un important marché et les capacités de production ne pouvaient couvrir que 60% de la demande. Outre la disponibilité de la matière première, l’énergie et la main d’œuvre à bon marché, Arcelor Mittal bénéficie d’un marché algérien porteur largement stimulé par un plan de relance économique très demandeur en produits sidérurgiques et en matériaux de construction et auquel il applique les prix de l’acier sur le marché international. Il faut souligner qu’un investissement minimum lui suffisait pour augmenter la production.
Moyennant « quelques bonnes primes », des départs à la retraite, des décès et des licenciements non remplacés, Ispat procède à un « dégraissage en douce » des effectifs, provoquant 1100 départs pour le seul mois de mai 2002. En même temps, il s’offre un large recours à la formule «Emplois Jeunes », financée par l’Etat algérien, pour le recrutement par centaines d’ingénieurs et techniciens. Autant d’aubaines qui lui garantissaient de rentabiliser son engagement en Algérie.
Sur le terrain, l’effet d’éblouissement de la gestion Mittal, volontiers mis en contrepoint avec les sombres années 90 de l’entreprise publique, a perdu de son éclat des premières années. Le repreneur va connaître son premier grand conflit le 1er aout 2007, quand vont débrayer 8000 travailleurs des unités de production et de commercialisation implantées dans différentes régions du pays (Annaba Pont Bouchet, El Hadjar, Hussein Dey, Reghaia, Blida, Ksar El Boukhari, Oran, El Khroub et Skikda). Toutes les installations et la chaîne de production étaient à l’arrêt, y compris l’unité portuaire où les travailleurs ont refusé de procéder au chargement des produits laminés destinés à l’exportation et de décharger une cargaison de charbon. Motif : la « mise au départ volontaire » des 1200 travailleurs à partir de septembre 2007. « C’est un volet social déguisé et sans consultation du partenaire social que tente de mettre en application Arcelor Mittal Steel », dénonce le nouveau syndicat[16].
Un diagnostic accablant
Au tableau enchanteur des premières années, a succédé une réalité plus prosaïque. Depuis sa reprise par l’Indien Lakshmi Mittal en 2001, puis la fusion avec le groupe Arcelor Mittal, le complexe sidérurgique d’El Hadjar n’a jamais vraiment atteint les objectifs fixés ou réalisé totalement les différents business plan arrêtés. En effet, cette usine, avec des capacités installées de l’ordre de 2 millions de tonnes, arrive dans ses meilleures années à produire au plus 1,2 million de tonnes malgré la mobilisation autour de cet objectif des quelque 7 200 travailleurs. Alors que le président-directeur général d’Ispat-Annaba annonçait solennellement le 1er novembre 2004 « nous devons atteindre une production de 1,5 million tonnes en 2005 pour arriver quelques années après à 5 millions de tonnes », performances, d’ailleurs, jamais réalisées, son successeur, Vincent Legouic, le manager en chef du complexe d’El Hadjar, doit se contenter d’un profil plus modeste, 750 000 tonnes en 2009, avec en prime la fermeture de la cokerie, et une prévision de un million de tonnes d’acier liquide pour 2010. En somme, avec un complexe « allégé » des deux tiers de ses effectifs, sans investissements significatifs, le leader mondial de l’acier ne parvient pas à réaliser des performances de production franchement supérieures à celles que réalisait l’entreprise publique Sider. Messaoud Chettih, son dernier P-DG, fait observer que « là où notre marché national affiche une demande importante, en rond à béton, Arcelor Mittal demeure faible en production. Elle couvre difficilement les 20% des besoins nationaux. Le reste est importé »[17]. En effet, depuis son installation en Algérie, les business plan du partenaire indien ont toujours été orientés vers les produits longs à faible valeur ajoutée[18]. En 2007, une évaluation a établi le déficit de la production par rapport à la demande à 4 millions de tonnes d’acier liquide, soit, au prix de 600 dollars la tonne, une dépense d’importation de 2,4 milliards de dollars. En matière d’investissements dans la maintenance des équipements, souligne Messaoud Chettih, ni Arcelor Mittal ni l’Etat n’ont fait des progrès considérables. En Algérie, révèle-t-il, seulement 3 dollars par tonne d’acier ont été investis sur les 20 dernières années, soit 6 millions de dollars en deux décennies. Résultat, le complexe d’El Hadjar a vécu au rythme des incidents techniques aux hauts fourneaux, à l’aciérie à oxygène et aux centrales électriques et des arrêts pour cause de pannes dues à la vétusté des équipements et à l’absence d’investissements de maintenance.
En réalité, le groupe indien n’a jamais manifesté un enthousiasme particulier à investir dans la modernisation des équipements et la mise à niveau du complexe.
La success story programmée, qui avait obtenu tous les atouts pour ne pas démentir, devait avoir valeur d’argument exemplaire vivant, en faveur de futures cessions dans d’autres secteurs de l’économie nationale.
Suites et pas fin
15 ANS APRES LA PRIVATISATION, L’ARNAQUE DU GEANT INDIEN DE L’ACIER MITTAL A EL HADJAR
L’échec de la privatisation d’El Hadjar
Le complexe, propriété de l’Etat algérien, avait été racheté à 70% en 2001 par l’indien Ispat, qui appartient au groupe Mittal. Il devait doper la siderurgie algérienne, il l’a dupée, en fait. Le bilan est négatif : sous-investissement, dégradation des installations et équipements, fermeture des sites de production essentiels, réduction des effectifs et pas d’amélioration des conditions de travail. La cokerie a été mise à l’arrêt depuis la fin 2010 car la multinationale indienne n’ayant pas intérêt à la réhabilitation de cette structure, préférait s’appuyer sur le coke que le groupe produit dans ses usines européennes, le coke importé «à moindre coût» pour alimenter le haut fourneau
Le complexe, faut-il le souligner, n’a pas concrétisé les prévisions du million de tonnes d’acier annuellement depuis sa reprise par ArcelorMittal en 2001. La production d’acier prévue pour 1 million de tonnes a chuté à 600 000 en 2012, puis a carrément dégringolé en 2013 et 2014 pour se situer à 300 000 tonnes aujourd’hui en 2015, au moment où la demande nationale a explosé pour atteindre pour les seuls ronds à béton et fils pour machines, environ 4 millions de tonnes, ce qui signifie qu’El-Hadjar ne fournit le marché national qu’à moins de 10%. L’importation lui coûte annuellement environ 10 milliards de dollars. La Banque extérieure d’Algérie (BEA), a été obligée de lui accorder un crédit bancaire de 14 milliards de dinars, dont 9 milliards destinés au rachat de la dette d’ArcelorMittal auprès de la banque
AOUT 2016 : L’Etat reprend le contrôle d’El-Hadjar[1]
Le complexe d’El-Hadjar, le fleuron de la sidérurgie algérienne, vient d’être récupéré par l’Etat après avoir été vendu au géant mondial de l’acier, l’Indien Mittal en 2001.
C’est ce que le ministre de l’Industrie et des Mines, Abdeslam Bouchouareb, a annoncé hier dimanche 8 Aout 2016
Dans un communiqué transmis au Quotidien d’Oran, les groupes IMETAL et ArcelorMittal ont annoncé la signature hier dimanche à Alger de l’accord final portant transfert total des parts sociales des sociétés ArcelorMittal Algérie (AMA), ArcelorMittal Pipes and Tubes Algeria (AMPTA) et ArcelorMittal Tébessa (AMT
La partie algérienne contrôlera de ce fait entièrement ces sociétés
Cet accord permettra d’avoir le contrôle total des trois sociétés, ce qui nous facilitera la prise de décision et la mobilisation des moyens pour assurer le succès de l’opération de revamping des installations industrielles et leur redémarrage dans de bonnes conditions. Il permettra également de stabiliser le climat social dans les trois sociétés, pour améliorer leur rentabilité et préserver les emplois ».
ArcelorMittal Algérie sera dorénavant SIDER El-Hadjar ; ArcelorMittal Pipes and Tubes Algérie sera SIDER TSS, et ArcelorMittal Tebessa sera Les Mines de Fer de l’Est, MFE. Spa
Les trois unités reprises sont des plateformes importantes appelées à jouer un rôle actif dans l’avenir de la filière sidérurgie-métallurgie algérienne et plus globalement dans la réalisation de notre ambition industrielle
Promouvoir l’autosuffisance du pays en acier, notamment les produits plats nécessaires au développement des autres filières industrielles ». Il a également précisé que
Cette opération de cession des participations n’avait pas donné lieu à une transaction financière et a donc été effectuée à titre gratuit, c’est-à-dire au dinar symbolique. Les discussions pour le transfert des actifs d’ArcelorMittal à l’Algérie avaient débuté en 2015 et un accord avait été vite trouvé pour la restructuration de l’actionnariat des trois sociétés.
Pour la partie indienne, il s’agit d’un bon accord. « Nous sommes satisfaits de la finalisation de cet accord avec le groupe public Imetal
Experts financiers et analystes avaient estimé que cet accord cache en fait un désengagement «en catimini» du géant mondial de l’acier du marché algérien, où il était en grandes difficultés. Le désengagement de Lakshmi Mittal du marché algérien a été également vivement critiqué par la classe politique selon laquelle le retour du complexe d’El-Hadjar au secteur public n’est qu’une Sortie par la grande porte du sidérurgiste indien d’Algérie, où il a laissé de grosses dettes et des déficits.
En 2013 l’Algérie avait porté sa participation à 51 %. En échange, elle a mis en place un plan de développement d’ArcelorMittal Annaba avec un apport de 700 millions de dollars dégagés par la Banque extérieure d’Algérie pour un programme de relance étalé sur la période 2014-2017.
Une «arnaque». 15 ans après son entrée en Algérie, le géant mondial de l’acier laisse à l’Etat algérien un complexe désorganisé, qui ne produit plus, et lourdement endetté.
Notes et renvois :
[1] Catherine Samary, L’investissement étranger en Europe de l’Est. Quel bilan ? Article publié le 30 mars 2002 par Attac France.
[2] On peut retrouver cette place seconde accordée aux besoins en capitaux dans l’argumentaire des IDE et de la privatisation développé par Abdelhamid Temmar, Abderrahmane Mebtoul, Abdesslam Belaid de même qu’elle est relevée par Ali Aissaoui à propos du projet de loi hydrocarbures de Chakib Khelil.
[3] Cf. ONUDI, Développement industriel, Rapport mondial 1997, p. 14. Selon M. Mekideche, par exemple, les IDE utilisent les biens et services locaux et les réorganisent aux standards internationaux en le tirant vers le haut (technologies récentes, meilleures pratiques managériales) in El Watan du 20 septembre 2006.
[4] « A l’heure de la mondialisation, estime l’économiste français G. Kebabdjian, il n’y a, semble-t-il, d’autres stratégies alternatives que la formation d’une offre compétitive dans le cadre d’une ouverture économique régionale » (cité par B. Hadjri dans sa communication aux Assises Algérie-France-Europe. Marseille, novembre 1998).
[5] Idem
[6] Ibidem
[7] Source ONS. Rétrospective 1970-2002.
[8] En janvier 2000, les 6 000 travailleurs d’Alfasid (filiale du groupe Sider) dans le complexe sidérurgique El-Hadjar à Annaba ont débrayé contre un projet de « compression » d’effectifs dans le cadre des préparatifs pour la privatisation de la société. Le mouvement est reparti le 15 mai suite au non-paiement des salaires. La protestation s’est étendue aux aciéries, à la cokerie et aux hauts fourneaux, et aussi aux Ateliers maghrébins de mécanique. Le 16, les ouvriers tentaient de manifester devant le siège de la direction.
[9] El Watan du.29 juin 1999 et Alger républicain du 8 août 2009.
[10] Liberté du 24 septembre 2000.
[11] Ancien enseignant de la faculté de droit et de sciences économiques de l’université d’Alger dans les années 1960 puis fonctionnaire de la Banque Mondiale, Hamid Temmar est entré au gouvernement après l’élection de Abdelaziz Bouteflika à la présidence de la république ; depuis 1999 il a occupé divers postes ministériels successifs, le dernier en date est celui de ministre de la Prospective et des statistiques (2010).
[12] Cf. Jeune Afrique, novembre 2005.
[13] Cf. Rapport semestriel 2002 de la fédération des travailleurs de la métallurgie, mécanique, électrique et électromécanique (FNTMMEE), affiliée à l’UGTA, qui passe en revue le partenariat conclu par le complexe sidérurgique d’El Hadjar, Sider, avec la multinationale indienne ISPAT, que le syndicat avait soutenu.
[14] Alger républicain du 8 août 2009.
[15] Au point où le patron du groupe industriel égyptien El Ezz Steel qui devait investir 1,25 milliard de dollars pour la construction d’un complexe sidérurgique à Jijel, «l’homme au 50 milliards de livres», comme l’appellent les Egyptiens, estimait insuffisantes les facilités fiscales et parafiscales offertes par l’Algérie ainsi que les avantages spécifiques accordés par le Conseil national des investissements (CNI). Le patron et homme de pouvoir égyptien a exigé que l’Algérie lui construise un quai à Bellara et lui garantisse du gaz à prix subventionné pour une durée de 25 ans. Le groupe El Ezz a également conditionné le démarrage du projet par la construction par l’Etat algérien d’une centrale électrique. Le groupe égyptien a estimé que cette demande était « logique » pour la simple raison que le groupe Arcelor Mittal s’est trouvé en possession d’une centrale électrique en rachetant 70% du capital du complexe sidérurgique d’El Hadjar. Cf. Le Quotidien d’Oran du 13 avril 2010.
[16] Cf. El Watan du 2 août 2007.
[17] Idem
[18] El Watan économie du 9 au 15 novembre 2009.