♦ Petit rappel introductif : le franc CFA est une monnaie utilisée par 14 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre, réunis au sein de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA, huit pays) et de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC, six pays). Créé en 1945, durant la période coloniale, le franc CFA est toujours régi par les mêmes principes de fonctionnement. Contrairement aux annonces faites par Emmanuel Macron en décembre 2019, le franc CFA de l’UEMOA n’a pas changé de nom et reste sous le contrôle étroit de Paris. ♦
Comment avez-vous été amené à vous intéresser au franc CFA ?
Ali Zafar : Au cours des vingt dernières années, j’ai travaillé comme macroéconomiste à la Banque mondiale et dans d’autres organisations, dont les Nations unies et la Fondation Gates, et j’ai conseillé de nombreux gouvernements du monde en développement en matière de politique économique. Je m’intéresse à la politique macroéconomique, à la compétitivité et au développement du secteur privé. J’ai travaillé à la Banque mondiale sur la stratégie d’intégration régionale de la CEMAC au début des années 2000 et sur la stratégie macroéconomique de plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest dans les années 2010, et au cours de ce travail, j’ai été de plus en plus intrigué par la zone CFA. Elle est à la croisée de nombreux défis en matière de développement et l’un des derniers bastions de la pauvreté endémique dans le monde rural.
Avant de travailler sur l’économie des pays de la zone franc, connaissiez-vous la manière dont fonctionne le franc CFA ?
Ali Zafar : Je ne connaissais pas avec précision le mécanisme de la zone franc. Au départ, j’ai accepté l’idée reçue selon laquelle il s’agirait d’une zone de stabilité macroéconomique.
Avec le temps, j’ai découvert à ma grande surprise que le système était un héritage de la colonisation et qu’il n’avait pas beaucoup évolué au fil des ans, et que les pays qui en dépendaient accusaient du retard par rapport au reste du monde en développement. J’ai eu la chance d’avoir étudié le français au lycée en Italie, ce qui m’a aidé à apprendre les choses rapidement.
Qu’avez-vous découvert de particulièrement étonnant ou choquant à l’issue de vos recherches sur le franc CFA ?
Ali Zafar : Il y a plusieurs choses qui m’ont choqué, si bien que j’ai dû écrire un livre sur le sujet, The CFA Franc Zone, Economic Development and the Post-Covid Recovery (Palgrave Macmillan, 2021) ! Il y a d’abord le fait que la zone franc continue à exister depuis autant de temps avec un arrangement monétaire aussi rigide, reposant sur une parité fixe avec la monnaie française (franc puis euro à partir de 1999), malgré l’évolution de l’économie mondiale et du commerce avec le reste du monde. C’est un système obsolète qui limite les options de politique macroéconomique des pays membres, en particulier en matière de politique fiscale et monétaire.
Ensuite, ce n’est pas un régime favorable au développement, l’accent étant mis sur une faible inflation plutôt que sur la croissance économique et le développement. Rien ne semble être produit dans la zone CFA en dehors des produits primaires, des métaux et du pétrole, en comparaison avec des pays comme le Rwanda et le Ghana.
Enfin, l’élite politique francophone est étroitement liée à la France – politiquement, culturellement et économiquement – et est généralement favorable à l’ancrage à l’euro. Dans la plupart des pays en développement, y compris parmi les anciennes colonies britanniques, la rupture avec l’ancienne puissance coloniale est nette, et les élites, que ce soit en Corée, au Vietnam, au Kenya en passant par l’Inde et le Mexique, sont imprégnées d’un fort nationalisme et d’un désir d’indépendance.
Vos travaux vous ont amené à constater que le franc CFA de l’UEMOA et celui de la CEMAC sont surévalués. Pouvez-vous donner des détails sur la manière dont vous êtes arrivé à ce constat ?
Ali Zafar : En 2020, la CEMAC présentait un désalignement [un écart vis-à-vis du taux de change réel considéré normal/en conformité avec ses caractéristiques économiques] de plus de 30 % et l’UEMOA un désalignement de plus de 20 %. La méthodologie utilisée pour obtenir ces chiffres est basée sur un modèle EGC (équilibre général calculable), développé par Devarajan, Lewis et Robinson (DLR) dans les années 1990 dans le contexte de la dévaluation du franc CFA. Il examine la manière dont le taux de change devrait s’ajuster en réaction à un choc commercial. Par exemple, si la CEMAC exporte du pétrole à 100 dollars le baril, et que le prix du pétrole tombe à 50 dollars le baril, le DLR mesurera la différence entre le taux de change réel (puisque le CFA est ancré à l’euro et ne change pas) et le taux de change dit « d’équilibre » (où le CFA évoluerait dans un régime plus normal).
En pratique, un taux de change surévalué agit comme une subvention pour les importations et comme une taxe sur les exportations. En l’absence de dévaluation, le système ne permet pas aux pays de réagir aux chocs. Si les prix des produits de base chutent, par exemple, le pays doit emprunter davantage ou réduire ses investissements, car il ne peut pas réagir de manière conventionnelle en laissant le taux de change s’ajuster, soutenir les exportations et réduire les importations. En conséquence, la monnaie est sujette à la surévaluation.
Quelles sont les répercussions du système CFA sur le niveau de vie des ménages ?
Ali Zafar : Le système CFA entraîne généralement une croissance du PIB réel par habitant inférieure à celle d’un régime de taux de change plus flexible. Ce n’est pas un hasard si les pays qui ont le plus réduit la pauvreté en Afrique – le Ghana, l’Éthiopie, le Rwanda et Maurice – sont des pays dont la monnaie est plus flexible et plus compétitive. Un taux de change déprécié déplace les ressources des biens non échangeables (services) vers les biens échangeables (produits nationaux et exportations).
Si l’on divise la société en cinq parties distinctes en fonction du revenu, du haut vers le bas, les 20 % les plus riches profitent le plus du système CFA, tandis que les 60 % suivants en profitent le moins, car ils ne peuvent pas s’intégrer aux chaînes de valeur régionales et mondiales. L’Afrique de l’Ouest importe la moitié du riz qu’elle consomme, ce qui coûte très cher à ces pays.
À propos de ceux qui se situent tout en bas de l’échelle, qui sont des paysans pratiquant une agriculture de subsistance, qui importent peut-être de la nourriture ou du carburant, il est nécessaire d’effectuer des travaux empiriques supplémentaires sur l’impact d’une monnaie moins chère sur les producteurs marginaux. Les travaux microéconomiques sur les conséquences de la dévaluation de 1994, auxquels je fais référence dans mon livre, ont confirmé l’augmentation de la croissance et la réduction de la pauvreté.
Vous dîtes que le franc CFA est un système pour les élites. Pourquoi et qui sont ces élites ?
Ali Zafar : Que des économies aussi pauvres soient liées à une monnaie aussi forte constitue une anomalie internationale. Le système crée deux catégories de personnes. Une monnaie forte et surévaluée profite à l’élite urbaine de l’Afrique francophone, qui importe des produits étrangers moins chers. Elle pénalise à l’opposé les producteurs ruraux et les industriels nationaux, dont les exportations sont trop coûteuses par rapport à celles des pays concurrents. Il y a moins d’incitations économiques à produire des biens localement.
Les grandes entreprises étrangères dominent le marché, dans des domaines allant des services publics aux ports en passant par la fourniture d’infrastructures. De puissants lobbies d’importateurs profitent également de ce système.
Le rationnement du crédit, qui est l’une des conséquences des règles de la zone franc, signifie qu’il est particulièrement difficile pour les petites et moyennes entreprises d’obtenir des financements. Si vous comparez le Kenya et l’Afrique du Sud avec le Sénégal et le Gabon en termes d’accès au crédit, vous constaterez que les premiers ont des taux d’intermédiation financière beaucoup plus élevés.
Par ailleurs, les règles de libre transfert des capitaux entre la CEMAC, l’UEMOA et la France font qu’une partie de l’élite francophone achète des actifs en Europe ou déplace des capitaux à l’étranger. C’est un monde de réseaux par excellence, avec des barrières élevées pour entrer dans tous les secteurs. Le lien étroit entre le Trésor français et les banques centrales, la BCEAO et la BEAC, cimente tous ces liens dans des arrangements formels. L’arrimage à l’euro et la mise en commun des réserves minimisent le risque de change pour les entreprises françaises et les autres entreprises étrangères de la zone franc.
Hormis le niveau de surévaluation de leur franc CFA respectif, y a-t-il d’autres différences entre la CEMAC et l’UEMOA ?
Ali Zafar : Les pays de la CEMAC sont riches en pétrole (à l’exception de la République centrafricaine). Ils souffrent de la malédiction des ressources, c’est-à-dire que leur richesse en ressources naturelles ne s’est pas traduite par un développement social et économique. La CEMAC présente l’économie politique des États rentiers et de nombreux problèmes de gouvernance. L’UEMOA est plus démocratique et possède une société civile plus dynamique et un espace de contestation.
Deuxième différence, l’UEMOA a plus de cohésion en termes de mise en commun des réserves de ses pays membres par rapport à la CEMAC. Cependant, étant donné que la zone du franc CFA exige une mise en commun de 50 % des réserves pour soutenir l’ancrage à l’euro, cet arrangement devient de plus en plus difficile à maintenir dans les deux zones. Dans la CEMAC, le déclin de la production et des revenus pétroliers, associé à la mauvaise gouvernance en République du Congo, au Tchad et en Guinée équatoriale, signifie qu’il sera de plus en plus coûteux de maintenir la parité avec l’euro. La CEMAC est clairement sur une voie plus insoutenable que l’UEMOA pour le moment, mais les crises au Sahel rendent également la gestion des réserves de l’UEMOA de plus en plus difficile.
Quelles sont les différences des pays CFA avec les autres pays en développement, asiatiques par exemple, notamment sur la question de la « stabilité monétaire » ?
Ali Zafar : Les pays asiatiques ont donné la priorité à la croissance et à la compétitivité. Ils ont toléré une inflation plus élevée que les pays CFA, mais les bénéfices ont été rapides. Ils se sont concentrés sur un développement axé sur les exportations et sur le renforcement de l’autosuffisance agricole et des capacités industrielles. Ils ont importé des biens d’équipement, puis ont remonté la chaîne de valeurs des exportations. Les banques centrales ont davantage le souci de travailler pour le développement que la BEAC et la BCEAO. L’essor des exportations a favorisé la constitution de réserves et a facilité une gestion macroéconomique. Le problème de l’inflation en Asie a été habilement géré en libérant les contraintes de production et d’approvisionnement.
Que peut-on apprendre de ces pays non-CFA ?
Ali Zafar : La leçon à retenir de l’expérience des économies asiatiques prospères est triple : il faut maintenir une monnaie compétitive, soutenir le secteur agricole par des politiques favorables aux premiers stades du développement, et soutenir le développement industriel par une politique industrielle « intelligente » (zones économiques, soutien des « gagnants » par le gouvernement, collaboration public-privé). L’expérience chinoise, vietnamienne et bangladaise repose sur ces facteurs.
L’option de création de monnaies nationales pour sortir du franc CFA vous paraît-elle être faisable ?
Ali Zafar : La solution que je privilégie dans mon livre consiste à faire en sorte que l’UEMOA adopte un ancrage à l’euro, au dollar et au renmimbi, ce qui correspondrait mieux à la structure de ses échanges. Pour la CEMAC, je propose un ancrage à l’euro, au dollar et au prix du pétrole. Il est important que la monnaie de la CEMAC évolue quand le prix du pétrole évolue. Je propose également de remplacer la garantie française peu claire par une ligne de swap [un échange de lignes de crédit] avec la Banque centrale européenne.
Ma préoccupation au sujet de l’option de créer des monnaies nationales, c’est que beaucoup de ces nouvelles monnaies nationales n’auront pas de crédibilité sur le marché internationale et auront besoin d’une sorte d’ancrage. Les défis pour le franc guinéen ou le franc de la République démocratique du Congo sont bien connus. Mais pour certains pays, comme le Sénégal, sortir de la zone et créer sa propre monnaie pourrait avoir un sens sur le plan économique, à condition de disposer d’une bonne structure institutionnelle et d’organiser des échanges de lignes de crédit (swap). En tant que macroéconomiste, je préfère les arrangements qui offrent à la fois stabilité et flexibilité.
Aujourd’hui, le projet de monnaie unique ECO de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) vous semble-t-il être une bonne option ?
Ali Zafar : Le projet de la CEDEAO est un rêve à long terme. Il serait bon d’avoir un espace économique commun en Afrique de l’Ouest et une monnaie commune. Cependant, il existe trois obstacles principaux. Le premier est le niveau de leadership, la préparation opérationnelle des pays et les institutions pour gouverner la zone. Le deuxième est le manque de cohésion politique forte et de confiance entre le bloc anglophone et le bloc francophone. Enfin, le mélange d’une économie pétrolière comme le Nigeria avec les nombreuses économies non pétrolières de l’UEMOA semble très difficile, notamment pour définir la monnaie d’ancrage. Les chocs sont asymétriques [car les pays ont des spécialisations économiques différentes et donc des conjonctures différentes] et il serait risqué pour les pays de la zone franc d’être soumis à la volatilité du naira nigérian.
Ma proposition : que les pays CFA passent à une monnaie dont la valeur reposerait sur un panier de monnaies et qu’ils s’associent ensuite à des pays comme le Ghana, qui est confronté aux mêmes chocs que la Côte d’Ivoire.
Mais n’est-ce pas ce que dit la France en ce moment ? Quelle est la différence entre l’option du gouvernement français et la vôtre ?
Ali Zafar : La différence entre mon point de vue et celui du Trésor français est que ce dernier insiste sur l’arrimage à l’euro en échange d’une garantie. Comme je l’ai souligné, je trouve que l’arrimage à l’euro est dépassé et qu’il entrave la compétitivité des pays CFA. Dans un tel contexte, je suis favorable à un panier de devises pour l’UEMOA, basé sur le triptyque dollar-euro-renminbi. En outre, je propose de remplacer la garantie ambiguë de la France par un échange de ligne de crédit plus clair avec la BCE. Nous pouvons voir que la France ne sera pas en mesure de fournir la garantie à la CEMAC étant donné ses propres défis fiscaux. Des conversations informelles m’ont confirmé que des fonctionnaires français sont d’accord avec moi. Le problème de la CEMAC est devenu un passif éventuel pour le Trésor français. Mais la géopolitique, et en particulier les préoccupations françaises concernant l’influence russe, l’emportent sur la macroéconomie…
L’ancrage de la CEMAC est clairement insoutenable dans le moyen terme, ce dont le FMI commence à se rendre compte. Les problèmes de la République du Congo, du Tchad et d’autres pays deviennent des problèmes de solvabilité plutôt que de liquidité. Ces pays ne disposent pas des réserves nécessaires pour maintenir la parité avec l’euro à moyen terme. Dans la CEMAC, l’ancrage doit se faire sur un panier lié à l’euro, au dollar et au prix du pétrole. Dans l’UEMOA, le Sénégal et la Côte d’Ivoire ne pourront pas soutenir éternellement le système avec leurs réserves limitées. Le taux de change doit se dissocier de l’euro, et le plus tôt sera le mieux.
Vous avez étudié les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les économies africaines. Cette dernière a-t-elle eu un impact plus important sur les pays de la zone franc par rapport aux autres pays africains ?
Ali Zafar : La zone franc, en partie parce qu’elle est moins intégrée dans les chaînes de valeur mondiales et les réseaux de logistique et de transport, a connu moins de décès que la majeure partie du monde.
Cependant, l’impact économique a été aussi fort que dans les autres parties du continent, sauf en Afrique du Sud, où la pandémie a eu un impact beaucoup plus important. Ce qui est différent dans la zone franc, c’est l’absence d’outils de politique budgétaire et monétaire (taux d’intérêt, variation de la masse monétaire) que les décideurs pourraient utiliser pour faire face à la pandémie.
Vous avez travaillé longtemps à la Banque mondiale. Est-il vrai que les économistes du FMI et de la Banque mondiale ayant mené des études montrant que le franc CFA est dysfonctionnel ne peuvent pas les publier ? Est-il possible aujourd’hui de débattre du franc CFA au sein des institutions financières internationales ?
Ali Zafar : Comme le montre le manque de publications, il existe généralement un tabou au sein des institutions financières internationales concernant les écrits sur la zone franc. Ce n’est pas un sujet qui permet de faire carrière pour le personnel travaillant dans ces organisations. C’est pourquoi le système n’est pas remis en question. Plusieurs des économistes que j’ai interviewés pour le livre ont demandé que leur nom ne soit pas mentionné. Si un article est écrit, c’est généralement pour louer le système pour sa stabilité macroéconomique plutôt que pour le critiquer pour ses mauvais résultats en matière de développement.
Comme je le soutiens dans mon livre, il y a eu un manque de courage de la part des intellectuels à propos du franc CFA et un triomphe de la politique sur l’économie. Or, nous devons en parler car c’est important pour l’avenir de l’Afrique francophone. Mais le monde commence à changer.
Est-il exact que la partie monétaire est exclue dans les discussions entre les pays africains de la zone franc et le FMI, selon une sorte de gentlemen agreement ?
Ali Zafar : Je n’ai pas connaissance d’un tel accord, mais je sais que le FMI a été prudent dans ses déclarations sur la zone franc et qu’il a été assez incohérent dans ses conseils politiques. Il existe de nombreux rapports intéressants du FMI sur l’Égypte et le Nigeria, dans lesquels le FMI soutient l’importance de la flexibilité du taux de change pour s’adapter aux chocs, mais ce discours n’est pas tenu à propos de la zone franc. Les intellectuels séduits par l’orthodoxie dominante n’examinent pas le système CFA de manière critique.
La Banque mondiale vous a-t-elle soutenu pour la publication de votre livre ?
Ali Zafar : Le livre a été écrit et publié alors que je n’étais plus à la Banque mondiale. La Banque mondiale se concentre davantage sur la politique structurelle, tandis que la gestion macroéconomique et la gestion des taux de change sont plutôt du ressort du FMI.
J’ai longtemps rêvé d’écrire ce livre, car j’avais le sentiment que le régime du franc CFA est un facteur majeur qui freine l’Afrique francophone et empêche nombre de pays de connaître le succès en matière de développement qu’on a pu observer dans de nombreuses autres régions du monde.
Mon objectif était d’apporter une expertise macroéconomique, une analyse des expériences asiatiques, et de proposer des alternatives claires au régime de change obsolète du franc CFA. J’espère que les décideurs politiques d’Afrique francophone réfléchissent de manière critique à la possibilité de dépasser ce système afin d’offrir une croissance plus forte aux populations. Ce n’est pas une solution magique, mais se débarrasser de l’ancrage à l’euro est une première étape essentielle.
Vous avez participé à un colloque consacré à l’avenir du franc CFA, en mai 2021, au Togo. Quelle leçon en avez-vous tirée ?
Ali Zafar : C’était un événement passionnant, et j’ai été heureux de rencontrer autant de collègues intéressants qui voulaient aller au-delà du débat stérile actuel et étaient heureux de proposer des alternatives au franc CFA. J’ai été surpris de constater qu’il y avait aussi peu de participation anglophone. On a l’impression que les mondes anglophone et francophone sont des univers séparés, qui devraient communiquer beaucoup mieux entre eux. J’ai été également préoccupé par le fait qu’il n’y avait que des universitaires, et non des décideurs politiques. Je pense qu’une discussion ouverte et honnête est le moyen d’aller de l’avant.
Entretien réalisé par Fanny Pigeaud