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27 décembre 2024

France : des opérations éclair au Mali ne sont pas à exclure


Nouvelle ère pour la FrançafriqueLa France, qui a envoyé ces dernières semaines des forces spéciales et des drones dans le Sahel, a déclaré qu’il n’y aurait pas d’unités françaises combattantes dans le cadre d’une éventuelle intervention internationale au Mali. C’est l’annonce qu’a faite le 11 novembre le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian, après le sommet d’Abuja, où des dirigeants africains se sont prononcés en faveur de l’envoi au Mali d’une force de « 3.300 soldats pour une durée d’un an, afin de reconquérir le nord du pays occupé par des groupes islamistes armés ».
« La France n’a pas à prendre une initiative militaire au Mali », a répété quelques jours plus tard M. Le Drian en marge d’une visite au festival interceltique de Lorient. « La France souhaite que ce soient les forces africaines, en particulier celles de la Cédéao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest – NDLR) et éventuellement de l’Union africaine, qui prennent l’initiative, c’est le sens de la résolution qui a été votée par le Conseil de sécurité », prenant néanmoins le temps de rajouter : « que nous puissions apporter du renseignement, c’est autre chose… ».
On ne sait pas bien si ce « travail de renseignement » implique la présence d’officiers français sur le terrain… Paris a en effet la mauvaise habitude de toujours omettre des détails. L’année dernière, la France, après avoir bombardé lourdement Abidjan (Côte d’Ivoire), avait attribué l’arrestation de l’ancien président Laurent Gbagbo, actuellement en procès à La Haye, aux rebelles des Forces Nouvelles de l’actuel chef de l’État Alassane Dramane Ouattara. La vérité éclatait quelques jours plus tard : les forces spéciales françaises avaient fait le sale boulot et avaient rendu Gbagbo aux rebelles.
Il semble en effet étrange que le président François Hollande ait envoyé des drones dans le Sahel pour finalement ne pas les utiliser. Confirmant ce qui était en train de se tramer, un officier lâchait dans un entretien au quotidien Le Figaro que « nous pourrons (l’armée française, NDLR) mener des opérations coup de poing contre Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique)… ».

Jean-Yves Le Drian reconnaît que les États africains « veulent aller vite sur le dossier malien ». Côté européen, il est prévu la création d’une mission européenne d’entraînement. Elle pourrait être composée de 200 militaires européens destinés à la formation des troupes africaines sur le territoire malien, essentiellement des forces spéciales fournies par la France, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne et l’Espagne. Les ministres de la Défense et des affaires étrangères de ces cinq pays doivent en discuter cette semaine à Paris.

Conformément au plan approuvé dimanche à Abuja, plus de cinq mille soldats maliens devraient ainsi participer à l’intervention armée dans le nord du pays, épaulés par quelque 3.300 autres militaires de la Cédéao. Mais le nombre de troupes déployées pourrait être finalement supérieur à ce qui est actuellement envisagé. La communauté internationale et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest font en effet pression sur l’Algérie, la Mauritanie et l’Afrique du Sud afin que ces pays contribuent à la mission armée. Mais tous les trois auraient gentiment décliné cette « proposition ». Selon l’Agence mauritanienne d’information, le président ivoirien Ouattara et l’envoyé spécial des Nations Unies pour le Sahel, Romano Prodi, ont téléphoné tous deux au président mauritanien, Ould Abdel Aziz, afin de le persuader de changer de cap. Le chef d’État Mauritanien, qui est hospitalisé dans un hôpital parisien pour convalescence après avoir été blessé par erreur par un coup de feu tiré par un soldat, a répondu une nouvelle fois par la négative.

Un concept d’intervention de nouveau débattu par le gouvernement de Nouakchott, qui a déclaré que l’envoi de soldats au Mali violerait la Constitution de la Mauritanie. « Une guerre contre les islamistes armés qui occupent le nord du Mali serait dévastatrice pour ses voisins, qui se retrouveraient à leur tour touchées par les cendres incandescentes d’un volcan », a déclaré Messaoud Ould Boulkheir, le président du Parlement de Nouakchott lors d’une réunion à l’Assemblée nationale. « Notre pays doit travailler sérieusement pour trouver une issue pacifique au casse-tête malien, une solution qui garantit son unité territoriale et protège son pouvoir démocratique », ajouta M. Boulkheir tout en soulignant l’importance des enjeux « compte tenu de la frontière que nous partageons et l’importance des intérêts communs avec le peuple frère du Mali ».

Iyad Ag Ghali, le chef d’Ansar Din, le groupe islamique qui, avec le MUJAO (Mouvement pour l’unité et le Jihad en Afrique de l’ouest) et Al-Qaïda au Maghreb islamique, contrôle le nord du Mali, a lui aussi tenu à s’exprimer sur l’opportunité d’un conflit de grande ampleur. Lors d’un entretien à Sahara media, le leader a déclaré que la guerre pour laquelle œuvrent les Africains « aura des effets négatifs sur tous les peuples de la sous-région », affirmant que son groupe a « fourni tous les efforts possibles afin d’éviter le fléau de la guerre ».  Iyad Ag Ghali ajoute qu’il rend le président malien par intérim, Dioncounda Traoré, « responsable entièrement de la situation à laquelle peut conduire la décision prise par les Africains d’envoyer une force militaire au nord Mali ».

Aux yeux du monde occidental, ce branle-bas de combat serait à mettre sur le compte d’un besoin humanitaire avéré. La presse n’est d’ailleurs pas en reste et relate avec abondance des histoires de mausolées détruits et d’amputations faites par des islamistes et imputables à une lecture littéraliste et puritaine de l’islam. L’intervention de l’OTAN en 2001 en Afghanistan avait été justifiée pour les mêmes raisons. On sait depuis que les gisements de métaux ferreux et non ferreux constituent un potentiel de développement et de croissance pour les entreprises qui envisagent d’y investir.

Or, Total vient récemment de signer un permis d’exploration avec les autorités mauritaniennes par lequel il acquiert, en tant qu’opérateur, une participation de 90 % dans le bassin de Taoudéni. Il est curieux de constater que cette localité se situe précisément au nord du Mali, dans la zone actuellement hors de contrôle de la France. Paris n’a donc pas vraiment intérêt à ce que cette zone soit déstabilisée, car cela risquerait d’entraîner par effet de boule de neige la confusion au Niger voisin.  Le groupe industriel français AREVA, leader mondial de l’énergie nucléaire, n’exploite-t-il là-bas pas son uranium ?

Á y regarder de plus près, les motivations humanitaires prennent rapidement le pas sur des considérations purement économiques. On comprend mieux l’empressement de la France à voir la situation se dénouer.

Capitaine Martin
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