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28 mars 2024

L’impertinente chienne de garde


L’impertinente chienne de garde

Mercredi 14 mars 2012 20h16

L’impertinente chienne de garde

http://www.agoravox.fr/actualites/medias/article/l-impertinente-chienne-de-garde-112375

Le douze mars au soir, le candidat Sarkozy est l’invité de TF1 pour tenter de convaincre les derniers esprits somnolents. L’homme est diablement habile. Affûté comme jamais, il gère sa promotion très proprement au fil des questions fades et superficielles. Sarkozy cite de Gaulle, qu’il aspire représenter tout en prêtant allégeance au néolibéralisme. Les contradictions vont bon train mais les journalistes n’entrouvrent guère de brèches, ils sont sages, comme d’habitude.

Le théâtre du marketing politique est fermement arrimé, néanmoins le débat est de mauvaise qualité comme dans la plupart des démocraties libérales où la servitude des élites politiques aux formules des agences de communications demeure sans fond, ni valeurs, ni odeurs d’honnêteté. Le but ne se trouve plus dans la discussion pour convaincre le peuple, il faut désormais attirer une clientèle électorale par d’autres moyens que l’argumentation sincère. Ce marché électoral doit rassembler le plus d’âmes possibles. Les stratégies de séduction de masse rejaillissent sur les citoyens qui pensent être l’objet de chaque mot, de chaque phrase. Il ne s’agit plus de mobiliser des catégories socio-professionnelles (médecin, ouvrier ou professeur), elles-mêmes profondément ancrées dans certaines valeurs sociales archaïques mais de toucher un homme dépourvu de ses racines par le biais d’un désert psychique opportunément acquis par la société de consommation, l’uniformisation et le conformisme de chacun.

Le rôle des médias de masse dans l’aveuglement des citoyens n’est plus à démontrer. Journalistes et experts développent un monolithisme doctrinaire, une pensée unique, une chape de plomb. Tout est cinéma, les acteurs se querellent sur des détails afin que tout reste en place. Ce sournois débat démocratique n’a pas une seule once de pluralisme.

Seulement, lundi soir, une incroyable lueur a frôlé chaleureusement la cafetière de tous les esprits aiguisés. Laurence Ferrari a surpris par son courage. Elle a évoqué le financement potentiel de la campagne de 2007 du Président Sarkozy par Muammar el-Kadhafi, le Guide Libyen. Stupeur. Sarkozy demeure verdâtre, la tête penchée en avant, le regard à la fois stupéfait et assassin. « Grotesque » pour l’instigateur des atroces bombardements en Libye. Certainement blessé par ces accusations, il ne perd pas pour autant son sang froid et assigne un dur revers à la journaliste de TF1, restée de marbre.

« Je suis désolé pour vous que vous soyez la porte-parole du fils de Kadhafi, franchement, je vous ai connue dans un meilleur rôle« , a-t-il dit.

Avant de conclure, « quand on cite M. Kadhafi qui est mort, son fils qui a du sang sur les mains, qui est un régime de dictateurs, d’assassins, dont la crédibilité est zéro, et quand on reprend à son compte les questions qu’ils posaient, franchement je pense qu’on est assez bas dans le débat politique »

Le futur nous dira si la version de Mediapart est crédible.

La Nouvelle Edition de Canal Plus indique qu’après l’émission, Laurence Ferrari se serait fait remonter les bretelles par le candidat Sarkozy et Nonce Paolini, le général cinq étoile de TF1. La démocratie libérale montre à nouveau ses petites limites. Dès que ce système marchand est attaqué sur les moyens peu scrupuleux de ses ambitions, la journaliste doit redevenir instantanément une chienne de garde, nourrie aux attendrissantes croquettes de l’Empire.

Pier Paolo Pasolini, cinéaste et écrivain de génie, révélait dans les années 1970 : « Le vrai fascisme est celui de la société de consommation ». En plus, de créer des êtres uniformes, sans particularismes, sans racines, sans âmes, c’est un système légitimé par une tolérance d’apparence mais qui se révèle être l’intolérance la plus sinistre, puisqu’elle demeure cachée.

Quand un journaliste digne osera évoquer la loi génocidaire Giscard-Pompidou de 1973 devant les français, nous pourrons certainement voir un semblant de liberté dans ce pays.

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