Réponse pertinente à la provocation indigente de Charlie-Hebdo
26 septembre 2012
Messieurs de Charlie Hebdo
Certes, vous excellez dans l’art de la caricature puisque votre journal est devenu sa propre caricature, de ce qu’il fut dans les années maintenant lointaines où il tentait d’être provocateur à l’égard des puissants.
Aujourd’hui, vous triomphez sans gloire.
Quand vous avez repris les dessins publiés par le Jillands Posten danois sous la direction culturelle de Flemming Rose conseillé par son ami Daniel Pipes néoconservateur américain, Philippe Val a été récompensé pour son outrage volontaire aux musulmans, il a été nommé à la tête d’une chaîne de radio nationale.
Qu’escomptez-vous aujourd’hui comme prébendes pour services rendus ?
Tout ce qui compte dans le monde politique et médiatique vous assure de son soutien arguant du droit imprescriptible à la liberté d’expression. Ce monde-là n’a éprouvé aucune gêne quand cette même liberté fut entravée par l’interdiction de manifester prononcée par le Ministère de la police. En effet, toute liberté est limitée par celle des autres, et elle doit l’être quand existe une menace de trouble à l’ordre public.
Il paraît juste que la mèche allumée par ces dessins sans aucune profondeur théorique ni pédagogique s’éteigne très vite une fois passée la très courte flambée de vente suscitée par votre fausse impertinence. Les Musulmans en France ont d’autres tâches plus urgentes, combattre l’injustice sociale, celle qui a mené à la pauvreté une bonne dizaine de millions de Français. Ailleurs, les Musulmans ont à combattre cette nouvelle version de l’impérialisme qui prétend les démocratiser à coup de bombardements, de phosphore blanc et de missiles à l’uranium appauvri.
Messieurs, vous n’êtes pas respectables.
Vous avez les rieurs de votre côté, mais ce rire n’est pas émancipateur, il prétend s’attaquer au plus intime du plus faible démuni économiquement.
Une de vos collaboratrices qui a jugé bon de se camoufler derrière un pseudonyme s’autorise à qualifier la ‘communauté musulmane’ de France d’ignorante. Elle semble découvrir que l’Islam est un monothéisme inclusif qui reprend dans son enseignement toutes les prophéties antérieures ce qu’une lecture même inattentive du Coran lui aurait appris. La Fête du Sacrifice commémore l’épreuve d’Abraham qui met en avant l’interdiction du sacrifice humain et l’obligation pour les pères d’épargner leurs fils, contrairement au dogme développé par une variante du judaïsme qu’est devenu le christianisme qui célèbre la crucifixion d’un Fils par son Père.
Mais ce n’est pas de théologie qu’il s’agit dans votre indigente campagne qui emboîte le pas
très opportunément à l’exhibition d’un piètre film qui serait tomber dans un oubli mérité sitôt fait n’eût été l’opiniâtre volonté de provocation de ceux qui l’ont commis. C’est bien sûr de politique et surtout de ses basses manœuvres qu’il est question. Celles qui consistent à faire advenir le choc des civilisations quand il n’en existe plus qu’une seule, dominante, globalisée, l’a-civilisation d’un capitalisme agonisant, de la marchandise et de son spectacle qui recycle tout pour le profit, ce que vous faites sans brio avec vos petites machinations.
Le système que vous servez arrive à son terme dans le fracas de ses armes.
L’armada occidentale va quitter l’Afghanistan, après son insigne production d’Al Qaïda.
William Hague a reconnu cette semaine que l’envahissement de la Syrie semble désormais impossible.
Il apparaît que votre prestation au vu de l’involution de la géostratégie occidentale ne portera pas ses fruits et qu’elle ne sera pas suivie d’octroi de nouvelles cures.
Badia Benjelloun, le 24 septembre 2012