LES RELATIONS DANGEREUSES ET OBJECTIVES. L’occident, le terrorisme et Boko Haram

Publié le juin 23, 2014 @ 11:21

Allain Jules

Pour le le sphinx, Gabriel Makang

Dans leur tentative  de refaire le Moyen-Orient, les pays occidentaux ont pris la stratégique décision d’éliminer les chefs d’Etats alliés devenus vieillissants, donc désormais inutiles tels que Zine Abidine Ben Ali de Tunisie et Hosni Moubarak d’Egypte, mais aussi des indésirables de longue date à l’instar de Mouammar Kadhafi de la Libye ou d’Assad de la Syrie. Pour atteindre cet objectif, ils ont utilisé leur dernière trouvaille : Les ennemis de leurs ennemis, en l’occurrence les groupes armés d’islamistes extrémistes.

Pourquoi ne pas réutiliser un scenario qui leur avait déjà réussi en Afghanistan contre l’armée soviétique ? En effet, pendant ce conflit à travers lequel les Etats-Unis ont voulu faire payer a l’Union Soviétique leur défaite au Vietnam, la CIA avait par l’intermédiaire des services secrets pakistanais financé et armé les Moudjahidines, des extrémistes musulmans, pour combattre l’armée rouge.

Avant que certains de nos lecteurs trouvent incroyable que l’Occident s’allie à des extrémistes musulmans, permettez que nous leur disions déjà ceci : Au niveau élevé des gouvernements, on traite par l’intermédiaire des services de renseignements avec la Mafia, les trafiquants de drogues, les seigneurs de la prostitution, les blanchisseurs d’argent ou les terroristes pour atteindre certains objectifs. D’anciennes guerres en Asie, à l’instar de la guerre dite de l’opium ont d’ailleurs été financées avec les revenus du trafic de drogue. Certaines opérations secrètes actuelles le sont d’ailleurs. Ce n’est qu’aux yeux des populations que les vilains sont les ennemis d’Etat.

Dans le cas précis du renversement des régimes Kadhafi et Assad, bien que les pays occidentaux avec à leur tête les Etats-Unis, aient une préférence pour des rebelles d’obédience islamique modérée, ils ne se sont pas gênés malgré leur pudeur officielle à utiliser les extrémistes musulmans. Ceux-ci en effet étaient plus efficaces sur le terrain à cause de leur doctrine extrémiste, de leur combativité et expérience acquises pendant les guerres d’Afghanistan, du Kosovo ou de Tchétchénie.

Les combattants islamiques et les pays occidentaux pour des raisons stratégiques différentes poursuivent le même objectif. Alors que les extrémistes musulmans cherchent à propager leur doctrine et à étendre leur influence par le renversement des régimes arabes « infidèles  » et le soutien d’autres groupes, les pays occidentaux, quant à eux les utilisent pour créer le chaos et un prétexte pour intervenir dans des régions riches en ressources naturelles ou alors pour affaiblir les Etats forts en les divisant. C’est bien ce qui s’est passé au Mali ou ce qui risque d’arriver en Irak.

Dans ce combat, Les mouvements islamiques du Maghreb à savoir AQMI, le Groupe Islamique Combattant en Libye (GICL), le Front Al-Nosra et l’Emirat Islamique en Irak qui sont des dérivées d’Al-Qaeda sont financés par les monarchies du Golfe alliées des Etats-Unis selon le Daily Express de Londres. Le GICL serait lui, directement financé par le MI 6, le service de renseignement britannique, tout comme l’observatoire Syrien des Droits de l’Homme.

Selon Paul  Joseph Watson, contributeur de Planet Prison, un site web d’informations, Al-Qaeda au Maghreb reçoit le soutien financier et logistique des Etats-Unis, de la France et de l’Angleterre.

Le World Net Daily a été le premier à révéler en février 2012 que des instructeurs américains ont entraîné les rebelles de l’Etat Islamique en Iraq et au Levant dans une base sécrète en Jordanie en 2012, ceux-là même qui veulent aujourd’hui renverser le gouvernement d’Al Maliki, le premier ministre iraquien. Cette information a été reprise par de nombreux journaux dont Der Spiegel, un hebdomadaire allemand.

C’est donc naturellement que ces groupes extrémistes musulmans soutiennent le Boko Haram et d’autres mouvements islamiques de la région tels que ceux du Mali et de Somalie en leur envoyant des financements et des armes, trésors des guerres de Libye et de Syrie. Ce sont ces armes qui permettent au Boko Haram de mener des attaques audacieuses avec des mitrailleuses, des roquettes lance-grenades, des pick-up montées d’armement anti-aérien.

Si les monarchies du Golfe tirent profit de cette réorganisation géostratégique du Moyen-Orient dans le renversement des régimes « ennemis » d’Iran et de Syrie, d’autres pays le font par alliance stratégique avec les pays occidentaux. Ainsi la Turquie, pays membre de l’Otan et candidat à l’Union Européenne fait partie de la nébuleuse qui arme les groupes armés islamiques. Hassan Hamade, un penseur et polémiste libanais est plus précis lorsqu’il affirme dans un article publié par le Réseau Voltaire que la Turquie a sur son territoire 3 bases d’entrainement d’Al-Qaeda dont l’une d’elles, celle d’Osmaniye est installée dans le voisinage de la base aérienne américaine d’Incirlik. Ceci révèle un certain degré d’intimité entre la CIA et Al-Qaeda.

Le même auteur affirme que la région du Sud de la Libye appelée le Fezzan abrite de nombreux camps d’entrainement d’Al Qaeda que les aviations françaises, britanniques ou américaines n’auraient pas de mal à détruire.

Selon Ngouegni N. Nadège dans son article intitulé La C.I.A et Boko Haram, un projet de déstabilisation programmé «la campagne actuelle de Boko Haram est une opération secrète organisée par la Central Intelligence Agency américaine, la CIA et coordonnée par l’ambassade américaine au Nigeria. En effet, Depuis quelque temps, la CIA a été en charge des camps d’entraînement et d’endoctrinement secrets le long des régions frontalières poreuses et vulnérables du Niger, du Tchad et du Cameroun ».

C’est probablement dans le cadre de cette stratégie globale qu’Hillary Clinton, a refusé en tant que Secrétaire d’ Etat de placer le Boko Haram sur sa liste des organisations terroristes après que ce groupe ait fait sauter à la bombe le quartier général des Nations Unies à Abuja en 2011 selon Josh Rogin dans un article publié dans The Daily Beast le 7 Mai 2014. Son successeur, John Kerry a fini par le faire mais cela ne change pas vraiment l’équation sur le terrain car ce groupe terroriste reçoit son soutien, non pas des gouvernements de façon officielle mais à travers des réseaux occultes que les sanctions ne perturbent pas.

Et pourquoi François Hollande a-t-il organisé la conférence de Paris sur Boko Haram s’il faisait partie du complot ? Une opération de manipulation médiatique qui lui aurait en même temps permis de pénétrer le système opérationnel des pays impliqués dans cette guerre, notamment celui du Cameroun, et d’avoir des troupes sur le terrain . Les appels de certains dirigeants occidentaux à la libération des 200 et plus lycéennes enlevées ? Une tentative de tromper le public sur les vraies intentions.

Mais une question persiste : Pourquoi le Boko Haram s’attaque-t-il au Cameroun qui dans un premier temps est pratiquement resté neutre dans ce conflit et a même fait des efforts pour éviter de poser des actes d’hostilité contre ce groupe ? Pourquoi ce groupe veut-il un conflit contre 2 pays voisins  au même moment ? C’est ce que nous verrons dans le prochain article.

Prochains articles :

  1. Pourquoi Boko Haram prend-t-il le Cameroun pour Cible ?
  2. Cameroun : Comment battre Boko Haram

Gabriel Makang pour le Sphinx Hebdo