TERRORISME INTERNATIONAL. Pourquoi Boko Haram prend-il le Cameroun pour cible ?

Posted on juin 26, 2014 @ 8:10

Allain Jules

le sphinx par Gabriel Makang

Les pays occidentaux incapables de faire compétition avec la Chine dans la conquête des marchés africains ont choisi de décapiter ceux des régimes africains qui, tels le Cameroun essaient de s’affranchir de leur tutelle.

Le Cameroun a en effet commis un crime de lèse-majesté vis-à-vis de la France en diversifiant ses partenaires économiques et en se liant à la Chine par un partenariat stratégique, ce qui n’est pas du goût de la France et des Etats-Unis qui travaillent tous à contenir la percée chinoise en Afrique. Si ces éléments expliquent pleinement la motivation de la France pour la déstabilisation du Cameroun qu’elle considère comme sa chasse-gardée, ils ne sont  pas suffisants pour justifier l’implication des USA.

Ce pays entretient des relations sereines avec le Cameroun et parce que n’ayant pas un passé proprement colonial avec l’Afrique, est perçu avec une certaine sympathie par les camerounais. Pourtant selon des informations crédibles, les USA ont décidé de déstabiliser le Cameroun en même temps que le Nigeria qui semble être leur première cible.

C’est que notre pays traîne avec lui un autre « péché », en plus de son rapprochement de la Chine : Il est au centre du Golfe de Guinée, une région fabuleusement riche en ressources naturelles. Quiconque contrôle stratégiquement le Cameroun et y possède des bases militaires domine toute l’Afrique centrale. Et ces puissances étrangères doivent trouver arrogant de la part du Cameroun qu’alors que même des pays européens tels que l’Italie ou la Grande Bretagne sont stratégiquement soumis au diktat de Washington auquel ils ont accordé le droit de posséder des bases aériennes, un pays comme le Cameroun ne veuille pas de troupes étrangères sur son territoire.

Bien que la France et les Etats-Unis soient souvent en compétition dans ce jeu d’influence et d’accaparement de richesses, ils semblent s’être accordés sur leur politique par rapport au Cameroun : Faire tomber le régime Biya en utilisant dans un premier temps la Seleka à l’Est du pays et Boko Haram au Nord pour refaire l’Afrique Centrale. Ils ne semblent pas maîtriser le processus de succession au Cameroun sur lequel le président Biya garde le flou et même un véritable mystère et n’ont ainsi aucune garantie que le pouvoir passera dans des mains d’un de leurs agents

N’ayant pas jusqu’à présent pu diviser l’opinion camerounaise, ni recruter un leader musulman capable de leur permettre de reproduire le scénario ivoirien, ces pays semblent avoir adopté à travers Boko Haram, la stratégie du chaos, la même qu’ils ont utilisée en Libye et qui jusque-là a échoué en Syrie grâce au soutien massif de la Russie et de l’Iran.

C’est dans ce contexte de conflit global  de positionnement stratégique qu’il faut interpréter les soutiens de la Russie et de la Chine au Cameroun contre Boko Haram. Les navires de guerre chinois qui ont mouillé dans les eaux territoriales camerounaises et la visite au Cameroun du vice-ministre russe des affaires étrangères il y a quelques semaines n’étaient pas seulement des gestes de solidarité, mais aussi un message fort envoyé aux occidentaux. Le Cameroun risque de devenir le terrain d’un affrontement entre les puissances de l’Ouest et de l’Est. Il faut s’y préparer.

En effet, si les pays occidentaux désirent déstabiliser le Cameroun, il faut s’attendre à une intensification  et à la sophistication du conflit, ainsi qu’à une guerre d’usure. Il faudrait que nous nous préparions pour un conflit véritable et long qui pourrait déboucher sur la création d’une véritable rébellion nordiste composée en partie d’éléments tchadiens et de la Seleka, exigeant la partition du Cameroun. Il faudrait que le gouvernement travaille à combler les points de vulnérabilité que nous évoquerons dans un futur article.

Il faut aussi s’attendre à des attentats dans les grandes villes dont le but serait d’altérer le moral des populations, de désorganiser la structure sociale du pays pour faire disparaître la notion d’Etat.

L’une de leurs techniques, dans le processus de déstabilisation d’un Etat, consiste à recruter des personnalités-clés du régime dans l’appareil militaro-sécuritaire et des personnalités politiques qui ne vont se révéler que lorsque celui-ci commence à vaciller. C’est le procédé que les Français ont utilisé en Côte d’Ivoire où certains généraux du président Gbagbo avaient été cooptés avant même l’éclosion des hostilités. Les Etats-Unis qui donnent une aide militaire à l’armée égyptienne l’ont de la même façon retournée contre Hosni Moubarak. Un coup de fil passé au chef d’Etat-major de l’armée égyptienne, contenant la menace de supprimer cette aide en matériel et en argent qui enrichit les généraux a amené ceux-ci à faire pression sur le Rais et à obtenir son départ.

Dans le cas du Cameroun, on a procédé aux enlèvements à répétitions des religieux occidentaux qui devaient servir de prétexte pour justifier la présence des troupes françaises sur le sol camerounais, soi-disant pour participer à leur recherche et sécuriser la frontière. La France a d’ailleurs à ce propos demandé au gouvernement camerounais le droit d’installer une base militaire permanente au Nord-Cameroun. Elle ne semble pour le moment n’avoir obtenu qu’un droit de passage ponctuel.

C’est pour détruire ce prétexte que le pouvoir camerounais s’employait à payer les rançons pour les faire libérer rapidement. La base militaire française sur le territoire camerounais aurait servi de foyer d’instigation de troubles et de violences armées dans la région.

La région du Nord Cameroun est la porte d’entrée idéale du fait de sa proximité géographique des territoires du radicalisme musulman, mais aussi des événements de la politique camerounaise. En effet, le souvenir des événements ayant entouré le putsch du 6 Avril 1984, la rancœur endormie qui règne entre des éléments des régimes Ahidjo et Biya et la récente arrestation de 2 élites du Nord dans le cadre de l’opération Épervier constituent des éléments que les ennemis essayeront certainement de mettre à contribution dans leur tentative de créer le chaos dans notre pays. Ils savent qu’un peuple uni et informé ne peut être conquis.

Cet article évidemment n’est pas un appel à la psychose ou au réveil d’un sentiment anti-islamique. La version camerounaise de l’Islam est modérée et toutes les communautés religieuses de notre pays ont toujours vécu dans la tolérance et le respect des croyances des autres. Nous voulons simplement exposer les méthodes de l’ennemi pour nous préparer à y faire face et anticiper sur ses manœuvres. C’est l’occasion de dépasser nos différents et de faire l’union sacrée autour du chef.

Ne laissons pas nos ennemis les exploiter. Ne croyez pas que parce que les ONG étrangères qui sont en réalité des organismes financés par les gouvernements étrangers construisent des points d’eau potables dans des villages, un centre de santé ou offrent des bourses à quelques enfants qu’ils veulent nous veulent du bien. La plupart de temps, ces actions font partie d’une stratégie de conquête des esprits et des cœurs qu’ils exploitent dans des conflits comme celui-ci. Ces actions ont pour but de créer un capital sympathie comme le faisaient les évangélistes d’avant les indépendances qu’on utilise pour recruter des traîtres et diviser la nation. Regardez seulement la violence qui sévit dans les pays où ils sont intervenus pour rétablir « la démocratie »

Nous conclurons par cette intéressante question : Quel choix fera Israël dans ce conflit ? Des experts de ce pays s’occupent de la garde du président Biya, forment les unités d’élite de l’armée camerounaise et entretiennent une fructueuse coopération militaire avec le Cameroun dont ils tirent des dividendes.  Ils ont de sérieuses raisons, en plus de la préservation de leurs intérêts financiers et stratégiques à garder leur renommée d’être infaillibles dans les affaires de sécurité. Jusqu’à présent aucun des chefs d’Etats dont ils assurent la sécurité n’a été assassiné ou renversé. De l’autre côté, Israël est un allié naturel et stratégique des USA auxquels i il leur est difficile de refuser un service.

Israël va-t-il choisir de livrer le Régime du Renouveau dont il maîtrise l’appareil militaro-sécuritaire ? De la réponse à cette question dépend de beaucoup le cours des événements

Prochain article : Cameroun : Comment gagner la guerre contre Boko Haram et ses sponsors

Gabriel Makang, Le Sphinx Hebdo