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28 mars 2024

4 jours à Téhéran


4 jours à Téhéran

Publié par Gilles Munier

28 Novembre 2014, 11:22am

Catégories : #Iran

4 jours à Téhéran

Par Gilles Munier /

Ayant passé une partie de ma vie à soutenir l’Irak dans ses combats, je ne pensais pas aller un jour en Iran. Aussi, lorsque j’ai reçu un courriel m’invitant à participer fin octobre dernier à la conférence des « Penseurs et des cinéastes indépendants », organisée par l’ONG New Horizon à Téhéran, j’ai cru qu’il s’agissait d’une plaisanterie… J’ai remercié les organisateurs et leur ai demandé de consulter ma biographie sur Wikipédia pour vérifier s’ils ne s’étaient pas trompés !

C’était bien une invitation. La réponse est arrivée le jour même par la voix de Hamed Ghashghavi, coordinateur de l’opération, qui m’a dit dans un français impeccable : « Nous savons qui vous êtes, nous connaissons vos engagements, venez si vous êtes intéressé, vous êtes le bienvenu…».

J’y suis allé, via Dubaï, la ligne Paris-Téhéran étant fermée à titre de sanction contre l’Iran. Cela me rappelait les 13 ans d’embargo imposés à l’Irak, la traversée du désert en taxi – Amman-Bagdad ou Damas-Bagdad – en moins.

Lobbies sionistes … 11 septembre

La conférence se tenait dans un des grands hôtels de la ville. Principal thème du programme: la campagne des lobbies israéliens contre l’Iran, notamment aux Etats-Unis avec Gareth Porter, un journaliste d’investigation américain de renom – auteur de « Manufactured Crisis: The Untold Story of the Iran Nuclear Scare » qui va être traduit en persan – et par le journaliste brésilien Pepe Escobar qui en ont démonté les mécanismes.

J’ai toujours considéré que l’Iran a le droit d’effectuer des recherches dans le domaine nucléaire à des fins pacifiques, comme je l’ai été pour l’Irak dont le réacteur Tamouz a été en partie détruit par l’aviation israélienne en 1981. Et, je ne vois pas pourquoi les Iraniens n’en feraient pas autant dans le domaine militaire puisqu’Israël possède – selon l’ancien président Jimmy Carter – entre 150 et 300 ogives nucléaires. Cela dit, il serait préférable qu’aucun pays du Proche-Orient n’en possède. Mais, il ne faut pas se faire d’illusions : aucune grande puissance n’imposera à Israël la destruction de son arsenal nucléaire, en tout cas pas la France qui en est à l’origine, comme elle l’a été des centres de recherches irakien et iranien (du temps du Chah).

Les activités des lobbies pro-israéliens en France, en Italie, en Belgique et en Grande-Bretagne ont été décrites par, respectivement, Maria Poumierancienne maître de conférences aux universités de La Havane et de Paris VIIIClaudio Moffaprofesseur d’histoire à l’université de Teramo – Isabelle Soumaya Praile, vice-présidente de l’Exécutif des musulmans de Belgique et Stefen Sizer, un pasteur anglican britannique.

Maria Poumier était depuis quelques semaines en Iran où elle présentait Amia repetita, son documentaire sur l’attentat commis à Buenos Aires en 1994 contre le Centre communautaire juif dont l’Iran a été accusé. Pour elle qui est allée enquêter sur place, il s’agit d’une opération sous faux drapeau effectuée par les services secrets israéliens. L’intervention du pasteur Sizer portait principalement sur la montée de l’évangélisme chrétien sioniste, sujet auquel il a consacré plusieurs ouvrages.

La séance consacrée aux attentats du 11 septembre, avec les interventions de l’américain francophone Kevin Bar­rett, de Wayne Madsen ancien consultant à la NSA – du cinéaste Art Oliver, et de Thierry Meyssan, réfugié à Damas, n’ont rien révélé de vraiment nouveau sur le sujet. La demande d’ouverture d’une enquête internationale sur ces attentats, formulée par ce dernier, a été retenue dans le communiqué final de la conférence.

Etat islamique en Irak et au Pays de Cham

L’émergence de l’Etat islamique autre sujet abordé – a été présentée comme une sorte de complot américano-israélo-saoudien. Interviewé par des journalistes iraniens, je n’ai pas caché qu’il s’agissait d’une analyse spécieuse et contre-productive. « Vous devriez poser la question au général Qassem Suleimani » leur ai-je dit, « il est bien placé pour savoir ce qui se passe en Irak ! ». « La montée en puissance d’Al-Qaïda, puis de l’Etat islamique est d’abord à porter au compte de l’invasion et de l’occupation de l’Irak, puis à la politique sectaire et obtuse de Nouri al-Maliki » et qu’à mon avis, ai-je ajouté : « les Etats-Unis vont en profiter pour entrainer l’Iran dans le bourbier irakien, ce qui n’est pas de l’intérêt de Téhéran, visé aussi par le plan de remodelage du Moyen-Orient ». Je n’ai pas eu l’impression de choquer mes interlocuteurs. La seule prise de parole intéressante concernant l’Etat islamique fut celle d’Imran Hussein, spécialiste sunnite de l’eschatologie musulmane, qui entrevoit dans le bouleversement causé à l’équilibre proche-oriental le risque à terme d’une guerre opposant les sunnites aux chiites au niveau mondial dont les Israéliens tireraient le plus grand profit.

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Conférence controversée à Téhéran

Par Gilles Munier (Afrique Asie – novembre 2014)

« Horizon nouveau », conférence reportée après l’élection d’Hassan Rouhani à la présidence iranienne, s’est tenue avec succès à Téhéran le 29 septembre et 1er octobre dernier. Une trentaine d’invités, dont beaucoup d’Etatsuniens – écrivains, journalistes, militants d’ONG – ont passé au crible les menées anti-iraniennes des lobbies israéliens occidentaux. Une session a été consacrée à la menace EIIL sur le Proche-Orient, et une autre à la dernière agression contre Gaza avec les interventions de représentants du Hamas et du Djihad islamique. Un appel à amplifier le boycott des produits israéliens a été lancé par Medea Benjamin et l’ancien Marine Kenneth O’Keefe, connus aux Etats-Unis pour leurs dénonciations des crimes US et israéliens. Art Olivier, ancien candidat libertarien à la vice-présidence des Etats-Unis, a annoncé le tournage de son film sur Rachel Corrie, manifestante non-violente américaine écrasée par un bulldozer israélien en 2003.

Il fallait s’attendre à ce que la session consacrée aux attentats du 11 septembre – où il fut rappelé que 60% des Américains ne croient plus à la version officielle de l’événement – pose problème. Les sites pro-israéliens US ont sauté sur ce prétexte pour qualifier la conférence de « conspirationniste », d’« antisémite », allant jusqu’à inventer la présence de l’humoriste Dieudonné (!) sur les lieux pour justifier leurs accusations. Qu’importe si Reza Montazani, organisateur de la réunion, avait précisé que le sionisme était seul en cause, qu’il ne tolèrerait aucun dérapage anti-juif… et qu’il n’y en a pas eu.

Photo ci-dessous: Une vue de la salle de conférence :

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