La mort des journalistes de Charlie Hebdo en janvier dernier semblait avoir tracé des lignes rouges dans le domaine de l’humour : on ne se moque pas des morts. Durant les jours qui ont suivi la tragédie, la justice française a condamné plusieurs personnes, dont des enfants pour avoir ignoré cette règle. On pouvait donc penser qu’elle serait désormais valable pour tous.

Hé bien, non. Le journal Charlie Hebdo vient de démontrer que nous avions mal compris. Le nouveau représentant de la démocratie français a décidé, au nom de la liberté d’expression, de publier une caricature sur le crash de l’avion de ligne russe en Egypte avec ses 224 victimes. Il n’y a donc pas de normes dans l’humour, en France. Ou alors, elles seraient ailleurs. En fait, elles ne concernent pas ce qui doit faire rire, mais qui doit faire rire. Il y a comme une sorte de licence de l’humour délivré, non pas par l’Université, ou le public pourtant meilleur juge en la matière, mais par les gardiens actuels de la pensée en France, dont l’influence remonte jusqu’au plus haut sommet de l’Etat et de ses institutions.

Ce petit cercle entre amis, retranché derrière des règles devenues lois, peut, au nom de la laïcité, de la liberté d’expression, de la République, de la démocratie, des droits de l’Homme, de la civilisation, ou de je ne sais quoi encore, dire et faire à peu près ce qu’il veut, comme il veut, y compris de dénier ce même droit aux autres. Les « autres », ce sont ceux qui ne font pas partie du cercle, ou qui n’en épousent pas les principes. Ceux-là peuvent faire l’objet de moqueries sans retenue ni tabou, au nom de la liberté d’expression, etc… En revanche, il n’est pas question que ces « autres », se permettent de faire le dixième de ce qu’on leur fait subir. Tout un arsenal juridique protégeant les minorités, les groupes, les communautés, les religions, les sectes, et même les particularités individuelles, sont prêtes à accueillir, via des associations créées à cet effet, toute tentative dans ce sens.

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Les journalistes de Charlie Hebdo, pour publier sa caricature, ont invoqué le fait qu’ils ne mettaient aucun interdit à l’humour. Ils respectent pourtant, à la lettre, la règle d’or : rire des « autres », surtout s’ils ne les aiment pas (Poutine, par exemple), mais jamais d’un des leurs. Ce qui fait dire à la porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe Maria Zakharova :

« La seule chose qui eût rendu ce journal crédible quant à sa prétention de ne reconnaitre aucun interdit à son humour, c’eût été de publier, le lendemain de l’attentat de janvier, des caricatures sur leur compagnons abattus ».

Il n’y a plus que les Charlie qui ne perçoivent pas la supercherie.

Avic – Réseau International