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10 octobre 2024

Quel type de démocratie ?


par Daniel MARTIN (son site)

 « La démocratie est un Etat où le peuple souverain, guidé par des lois qui sont son ouvrage, fait par lui-même tout ce qu’il peut bien faire et par ses délégués tout ce qu’il ne peut pas faire lui-même  » Maximilien de ROBESPIERRE

Démocratie pervertie et perversion de la démocratie ?…

La démocratie représentative est très loin de celle de la Grèce antique. La démocratie athénienne était directe, chaque citoyen était libre d’assister à l’assemblée populaire, qui se réunissait plusieurs fois par an et qui décidait sur toute la gamme des activités gouvernementales. Tout homme était investi du droit à la liberté de parole, de participer aux débats de l’agora où s’exprimait la volonté politique du peuple, et de se porter candidat aux postes de direction, pour lesquels les désignations étaient décidées par tirage au sort dans la plupart des cas, à l’exception des chefs militaires qui étaient élus. L’esprit délibératif d’un gouvernement démocratique trouvait sa signification dans le refus de toute conception élitiste de l’État.

La démocratie représentative, malgré ses différentes formes d’expression par le biais des élections (Scrutin proportionnel total ou partiel, scrutin uninominal, synthèse des deux…) est caractérisée par un système oligarchique du pouvoir avec la présence incontournable au sein des partis politiques de dirigeants, souvent inamovibles et du même coup met en évidence la perversion de cette « démocratie », puisque les partis deviennent des écuries avec pour seul objectif : permettre à leurs leaders d’accéder au pouvoir suprême… Si l’objectif d’un parti politique est bien de parvenir au pouvoir, et que selon la constitution en son article 4 « les partis concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement ». Ce qui suppose pour ces partis un projet politique qui intègre et conjugue les problématiques de notre temps avec celles à venir afin d’anticiper et prévenir par des mesures adaptées d’éventuels désordres futurs. Mais force est de constater, les dernières élections Présidentielles furent une caricature en la matière, que l’on est très loin de ce que l’on pourrait espérer de la part de ces partis politiques et de leurs responsables.

Dans l’oligarchie politique moderne, la science et la technique vont également participer à la perversion de la démocratie, dès lors qu’elles parviennent à hisser les gouvernants au rang d’une sorte de caste où ils sont considérés, au nom de la compétence, grâce à des connaissances particulières seuls capables d’administrer la gestion des affaires publiques de manière rationnelle, efficace et impersonnelle. La bureaucratisation et la complexification croissante du système politique qu’ils entretiennent vont servir à justifier cette « compétence politique » où la primeur irait à une « caste » issue des grandes écoles conçues à cet effet, telle l’ENA. Cette caste serait ainsi la seule habilitée à exercer le pouvoir, lequel induirait d’office la technicisation des enjeux et la professionnalisation du personnel politique… L’art de gouverner ne saurait donc être à la portée de tous. Du coup cette « caste » participe de plus en plus à la « neutralité » de l’État, en faisant appel à l’expertise technique et aux nouvelles formes de communication. Ce qui fait dire à nos concitoyens au moment des élections « qu’ils sont tous pareils, ils ne pensent qu’à eux et que de toute façon ça ne changera pas… » Dès lors, l’abstention, le vote nul où celui en faveur des extrémismes pour obtenir du « changement » devient très majoritaire.

Le rejet de cette « caste » formée de dirigeants souvent inamovibles expliquerait ainsi la réussite de l’opération « En marche » initiée par Emmanuel MACRON.

On peut toutefois s’interroger et poser la question : l’ascension aussi rapide d’Emmanuel MACRON, son mouvement »En marche » et la « Macromania » qui prévaut en ce premier tour des élections législatives, qui sera probablement confirmé au second tour, ne reflète-t-il pas une forme plus instruite et plus subtile du populisme, tel qu’il a pu être exprimé par une certaine Gauche et surtout par l’extrême Droite ?

Emmanuel MACRON avec « En marche », bien, et nul n’en doute, qu’il ait bénéficié de généreux soutiens financiers, sa réussite en un temps aussi bref ne saurait s’expliquer seulement par ce fait ou celui de sa participation Gouvernementale, même si cela l’a aidé. Son succès s’est surtout bâti en exploitant une forme de populisme laissé vacant par la classe politique et dans lequel « s’engouffrait » la majorité de la population. Outre quelques propositions alléchantes et nécessaires en direction des petites entreprises, ou d’autre catégorie de la population, l’idée simpliste selon laquelle il fallait changer la politique en dépassant les clivages Gauche – Droite, c’est-à-dire « prendre ce qu’il y a de meilleurs à Gauche et à Droite dans le seul intérêt général pour sortir le pays de la crise » formule du reste souvent utilisée par nos concitoyens totalement dépolitisés. Comme si ce qui est bon à Droite et à Gauche pour les uns, l’ait forcément pour les autres ?… Certes, il y a de forts dénominateurs commun entre les uns et les autres concernant les Droits fondamentaux, mais cela ne signifie pas pour autant que Socialistes, libéraux, écologistes, nationaliste etc. puissent partager un programme identique de gouvernance, car ils seraient tous les même.

Attention, qu’elle que soit la forme de populisme auquel les politiques ont recours, il est l’antichambre de toute dictature

Le populisme est inséparable des situations de crises politiques et d’une entropie démocratique qui fait qu’au fil des discours, des engagements non tenus, des promesses qui conduisent à la faillite. Pour faire plaisir aux électeurs, quand il ne traite pas que de l’écume des choses, le responsable politique a choisi de ne pas dire ce qui fâche, de ne lui apporter que des perspectives réjouissantes. Mais ceci nous a conduits, depuis de nombreuses années, à accumuler du déficit budgétaire. Sans compter des budgets de communication totalement indécents, non pas pour informer, mais pour faire la promotion des élus et préparer leur réélection.

Pour le plus grand plaisir des banquiers et des marchés financiers, cela a conduit notre pays à la situation financière désastreuse que nous connaissons et va affecter durablement les prochaines générations, lesquelles, si tant est qu’elles puissent y survivre, elles devront également relever les défis d’une crise écologique bien plus grave encore que les déficits que nous leur léguons.

Caractérisé par le rejet de tout affrontements intellectuels programmatiques, c’est-à-dire idéologique, auquel les politiques substituent des formules populistes simplistes, voire pour certain(e)s haineuses en direction de certaines populations, ainsi que la professionnalisation des élu(e)s avec les effets pervers que cela peut produire….

Le syndrome est connu : la formation de puissantes machines électorales, l’apathie des citoyens, l’aveuglement des élites. Or, le facteur psychologique reste dans le clair-obscur des modèles historiques. Autres éléments qui sont évoquées : les théories interprétatives du populisme, les indices du langagiers du discours, et le leadership émotionnel de la peur, par exemple, en mettant exagérément en évidence certains faits dramatiques d’origine criminelle, pour lesquels à chacun il y aura une nouvelle loi, dont les effets seront nuls pour éviter que ces faits ne se reproduisent, mais progressivement deviendront liberticides . Sans réels contre pouvoir des citoyens, cela use la démocratie représentative et peut l’entraîner vers sa chute. Le populisme est l’antichambre de toute dictature.

Quel mode de scrutin pour améliorer la démocratie représentative

Actuellement, suivant l’élection, le scrutin majoritaire qui est une modalité du vote, vieille de plus d’un siècle en France suscite une rituelle controverse. Quand on sait, par exemple, que si le résultat au second tour des législatives du 18 juin 2017 était semblable à celui du premier tour, avec un taux d’abstention identique, en ayant obtenu un tiers de voix, La « République En Marche » devrait se retrouver avec les trois quarts des députés à l’Assemblée. Majorité obèse, parti unique, domination écrasante : les critiques fusent.et on conclut que les « Macronistes » tiendront d’une main de fer l’Assemblée alors qu’ils représentent tout au plus 15% des inscrits.

Pour éviter ce type de situation, nombreux sont ceux qui réclament l’instauration d’un scrutin proportionnel. A l’exception de MITTERRAND en 1986, dans le but transparent d’amortir l’inéluctable victoire de la droite, geste tactique bien vite annulé, lors de sa réélection en 1988 et que pas un autre Président n’a et ne souhaite remettre à l’ordre du jour. En fait, ce sont les minorités qui souhaitent la proportionnelle. Mais quand la minorité devient majoritaire, elle change d’avis…

On dit ensuite que cette méthode garantit une meilleure représentation de la volonté populaire. Arithmétiquement, c’est incontestable : avec un scrutin proportionnel, le parti qui a 10% des voix a 10% des sièges. Chacun est présent au Parlement en raison de son influence. Mais la proportionnelle rend très difficile l’émergence d’une majorité claire, ce qui est incompatible avec l’esprit de la 5 eme République… Rares sont les partis qui remportent la majorité des voix à eux tout seuls dans des élections législatives. Il faut donc des coalitions.

  • Avantage : on introduit une culture de compromis qui souvent fait défaut. Nos voisins européens la pratiquent depuis longtemps.
  • Inconvénient : par définition, un accord de coalition est négocié par les responsables de parti. En général, le parti arrivé en tête cherche des alliés. Selon qu’il en trouve sur sa droite ou sur sa gauche, il mène une politique plus à droite ou plus à gauche. Dans cette inflexion, les électeurs n’ont plus aucune part d’expression pour s’y opposer ou réorienter les décisions. Ainsi après avoir voté en majorité pour une politique ils peuvent en voir une autre s’appliquer. Où est la représentativité ? Sous couvert d’une meilleure représentativité des sensibilités politiques des citoyens, on donne un pouvoir quasi absolu aux responsables des partis qui vont pouvoir surtout négocier leur carrière politique avec des voix d’électeurs, dont ils ne sont en aucun cas détenteur.

 

Maintenir le scrutin uninominal à deux tours pour les élections législatives, tout en permettant la représentativité des minorités, c’est possible.

Avec le quinquennat, l’élection des députés qui intervient immédiatement après celle du Président de la république suit inévitablement depuis 1958, la dynamique Présidentielle, avec plus ou moins de force. L’élection Présidentielle au suffrage universel direct fige surtout la vie politique Française autour de cette élection, pour laquelle, les partis politiques sont réduits à une fonction permanente « d’écurie Présidentielle ».

Avec l’introduction des primaires, comme nouvel usage pour  » sélectionner » une candidature à l’élection Présidentielle, quelle que soit la formule d’élargissement plus ou moins large de l’électorat à Gauche ou à Droite que va choisir le parti politique, celui ou celle qui aura en final les « préférences » de l’électorat concerné, Sera généralement « l’apparatchik » qui maîtrise le mieux le parti dominant dans lequel il a su tresser les liens utiles, tant à l’intérieur, qu’à l’extérieur, en particulier avec certains lobbys et les médias les plus influents. Mais l’importance des liens tissés à l’extérieur est surtout vrai pour les deux principaux partis, dont sera issu le, ou la futur(e) Président(e). Pour les autres, c’est essentiellement à l’intérieur du parti le plus important, en cas de coalition, que la partie se joue entre les concurrents. Depuis 2012, date des premières primaires, elles ont surtout servi à éliminer les « pointures » qui ont émergé dans les différents partis.

Maintenir le scrutin de circonscription territoriale, uninominal à deux tours avec un « correctif » pour permettre aux minorités d’être représentée, tout en assurant une stabilité politique.

En 1989, dans le cadre d’un débat interne au sein des Verts de l’époque j’avais proposé une réforme permettant la représentation des minorités politiques et qui se traduisait de la manière suivante :

A l’issue du premier tour de scrutin des élections législatives au scrutin uninominal, tous les partis, ou groupements de candidats, qui avaient agréé 175 candidats et obtenu au premier tour, entre  275 000 et 500 000 voix se verraient attribuer 2 sièges de Députés, plus un par tranche ou fraction de tranche de 250 000 voix.

Afin de ne pas sur représenter les formations politiques, petites ou grandes, les partis ou groupements de candidats qui auraient obtenus des Députés au suffrage universel direct, soit en leur nom propre, soit par le jeu des apparentements, leur nombre serait déduit de celui du correctif éventuel auquel ils auraient droit. (Ces chiffres n’étaient qu’une proposition, servant de base de discussion pour un débat qui reste ouvert).

Par exemple : si on se réfère au résultat obtenu au premier tour

Les Ecologistes (s’ils sont rassemblés) avec 973 527 voix auraient droit à 4 députés

La France Insoumise avec 2 497 622 voix aurait droit à 10 députés

Le FN avec 2 990 454 aurait droit à 12 Députés

Dans cet exemple, si ces partis avaient obtenu, seul ou en groupe, un ou plusieurs députés au suffrage universel à l’issue du second tour, ils seraient déduit de ce correctif. Les députés désignés par ce correctif seraient soumis aux mêmes Droit et Devoir que leurs collègues élus au suffrage universel direct pendant toute la durée de la législature, ils ne seraient toutefois pas rattachés à une circonscription territoriale, excepté celle théorique du palais Bourbon.

Ce système suppose que le nombre actuel de Députés soit réduit, en particulier dans les métropoles urbaines à forte densité de population, de manière à y intégrer ceux élus grâce au « correctif » sans excéder le nombre actuel de 577. Contrairement au découpage actuel des circonscriptions qui sont faites au niveau Départemental, ce qui n’est pas très logique pour un scrutin national, le découpage des circonscriptions doit se faire dans le cadre d’un schéma National, ce qui signifie qu’une circonscription électorale pour l’élection des députés pourrait se situer sur plusieurs Département. Cette proposition n’est autre qu’une contribution parmi d’autres à un débat qui s’avère de plus en plus nécessaire.

Pour conclure

A l’heure des nouvelles révolutions du numérique et des liens qui se tissent entre internautes, tout en veillant aux libertés individuelles, Il ne faut cesser d’accorder de nouveaux Droits et contre pouvoir aux citoyens. Améliorer les dispositions de la loi concernant la commission du débat public National de manière à faire mieux participer, voire faire sursoir par les citoyens concernés un projet non utile aux effets des plus néfastes pour l’environnement et la santé , ainsi que d’accorder ce qui se fait, outre les USA et de nombreux autres pays dans le monde : le référendum révocatoire d’initiative citoyenne. Il est censé permettre aux électeurs d’une circonscription ou d’un État d’exprimer leur désaccord politique ou leur perte de confiance vis-à-vis d’un élu en demandant sa révocation avant la fin de son mandat. En Europe on trouve : Allemagne, Biélorussie, Pologne, Royaume-Uni, Suisse.

 

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