Al-Jazeera: Un revirement criminel récent contre la révolution tunisienne, la Jamahiriya Libyenne et la Syrie
25 mai 2012
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Pas un complot originel: La chaîne de télévision Al-Jazeera (Qatar) avait acquis, avant son récent retournement, une telle crédibilité que Bush et Blair suggérèrent de la bombarder… L’argument d’un complot né avant même le lancement d’Al-Jazeera il y a quinze ans n’est pas recevable pour plusieurs raisons passées ici en revue. Dans une analyse rare de l’hyper-puissance de Qatar, Georges Stanechy a abordé la question complexe de l’évolution de cette chaîne en décrivant un « surprenant revirement » datant d’il y a un an à peu près [1]. Le brusque changement de cap est apparu simultanément avec le bourgeonnement des fleurs de jasmin au ««printemps arabe»»[2]. Ce revirement soudain a même pris un caractère « officiel » le jour où Hitlery Clinton , dans une intervention pourtant peu remarquée, a exprimé publiquement son admiration pour Al-Jazeera dans sa couverture des événements en cours. Une telle déclaration de la part d’un responsable étatsunien était restée inimaginable pendant plus d’une décennie [3-4]. En effet, la position éditoriale audacieuse d’Al-Jazeera avait contrasté jusque là avec celle de BBC Arabic dont étaient issus les journalistes qui allaient rendre la chaîne qatarie mondialement célèbre et que certains ont quittée récemment en forme de protestation [5]. Pensons à sa couverture unique de la guerre contre l’Afghanistan que l’impérialisme a récompensée par le bombardement de son bureau à Kaboul, l’emprisonnement de son correspondant local Taysir ‘Alluny et les poursuites judiciaires à son encontre (Espagne). Puis, il y a eu l’Irak où la chaîne a perdu du personnel et où son bureau a également été touché. Enfin, il y a eu cette idée désespérée de Georges Bush et Toni Blair d’envoyer un missile pour détruire les quartiers généraux de la chaîne au Qatar. Les surprenants propos furent officiellement enregistrés lors d’une conférence où les deux funestes et criminels personnages [6], croyant que les microphones de la salle où ils se trouvaient avaient étaient débranchés, s’étaient exprimés librement et en toute sincérité… En dehors de sa couverture unique de l’actualité des « points chauds du globe » ciblés en permanence par l’impérialisme, Al-Jazeera était surtout devenue célèbre par son « émission phare » du mardi soir intitulée « Al-Ittijah al-Mou’akis », animée par le journaliste syrien Faysal Al-Qasim [7] . Deux points de vue politiques (réellement) opposés étaient présentés avec une objectivité indéniable. Parexemple, un invité syrien « pro-gouvernemental » faisait face à un membre de l’opposition syrienne. De même en fut-il pour la Libye, etc. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, les confrontations les plus véhémentes n’ont pas eu lieu lors des débats autour de la Syrie ou de la Libye mais à propos d’autres comme la Tunisie, l’Egypte ou l’Algérie. Dans ce dernier cas, on a même vu l’invité représentant le point de vue gouvernemental, indigné, se lever avant même la fin de l’émission et quitter le studio… D’une manière tout à fait intéressante, ces émissions du mardi soir avaient permis de révéler, grâce à un débat réel, la faiblesse de l’argumentation des oppositions syrienne et libyenne, par exemple. Une comparaison illustrant cette remarque pourrait se faire avec le rapport de la mission récente des observateurs de la Ligue Arabe en Syrie lequel a démontré le degré d’exagération des accusations portées contre le gouvernement syrien. Mieux encore, on pourrait citer le refus par l’ONU de répondre favorablement aux propositions, répétées et ô combien honnêtes, de la Grande Jamahiriya Libyenne, de nommer une commission indépendante chargée d’enquêter sur place en Libye et en toute liberté sur les allégations, diffusées tort et à travers, dont la seule source était la soi-disant opposition libyenne. Contrairement à ce que reprochent rétrospectivement certains nationalistes arabes à Al-Jazeera, une telle mise en scène de vues opposées n’avait rien de séditieux. La preuve en est que les gouvernements de Syrie et de la Grande Jamahiriya Libyenne eux-mêmes avaient tôt accepté le jeu démocratique de la chaîne panarabe. En effet, Al-Jazeera disposait de correspondants permanents à Damas et Tripoli. Suite au revirement ultérieur, il apparaît que le Guide de la Révolution Libyenne Muammar Al-Gaddafi (« Mouammar Kadhafi ») a été trompé en raison de la confiance qu’il avait accordée à l’Emirat et à sa chaîne. Isratine (contraction de Israel et Palestine), le projet de paix perpétuelle basée sur Un Seul Etat proposé par Muammar Al-Gaddafi. Les critiques soulignent aussi qu’Al-Jazeera faisait usage d’une carte géographique du Moyen Orient indiquant « Israël » au lieu de « Palestine ». Probablement était-ce une manière de « se faire accepter » par la ««communauté internationale»». En effet, un choix plus judicieux aurait été d’indiquer « Israël/Palestine » ou, mieux encore, « Isratine » comme le proposa Gaddafi lui-même [8] . Quand au fait que des généraux et experts israéliens s’exprimaient à l’antenne, elle relève du même principe tactique, n’en déplaise encore aux nationalistes arabes (panarabistes, «nassériens», etc.), sans parler des «communistes» qui, dans leur grande majorité, sont restés étrangement silencieux pendant les 7 mois de bombardement de la Libye par une alliance impérialiste de 40 Etats dirigés par l’OTAN. S’agissant d’Al-Jazeera et de la Libye, Faysal Al-Qasim s’était notamment fait remarquer (vers 2001) par l’entretien exclusif qu’il accorda à Muammar Al-Gaddafi. L’entrevue eu lieu dans le bureau vert de ce dernier et le journaliste interpela son illustre invité en ces termes respectueux termes : « Akh Al Qai’d » (Frère Guide). L’occasion de la rencontre était notamment la tenue, le lendemain même, d’une séance de la Ligue Arabe. Gaddafi révéla, preuve à l’appui comme à son habitude, que les conclusions de la réunion en question avaient déjà été imprimées et il brandit le document sous les yeux, pleins d’admiration, du journaliste d’Al-Jazeera. Des personnalités étrangères étaient également invitées à débattre de temps à autre. Ce fut par exemple le cas d’une courageuse militante anticolonialiste et écologiste française (co-fondatrice, par ailleurs, de la récente commission d’enquête non gouvernementale sur la vérité en Libye). L’activiste eut à « en découdre » avec, si notre mémoire est exacte, un réactionnaire ou autre liquidationniste au sujet de la Palestine [9]. Al-Jazeera s’est longtemps caractérisée par son slogan révolutionnaire: « Ar-Rai wa-r-Rai Al-Akhar » (que soit exposée la pluralité des opinions) lequel est, évidemment, devenu tragiquement obsolète depuis le revirement récent de la chaîne. En effet, ni sur Al-Jazeera ni sur pratiquement aucun média « occidental » de large diffusion, les téléspectateurs ont le droit actuellement à un double point de vue, au sens symétrique du terme. Comme si le grand public n’était constitué que d’enfants, la très grande majorité des « tables rondes » de la BBC, France24, etc. offre des « débats » faisant intervenir des « experts » et « spécialistes » autant prudemment timorés qu’appartenant au même camp idéologique soutenant plus ou moins subtilement l’interventionnisme armé partout dans le monde. Conclusions et recommandations Al-Jazeera (ici English): « Gaddafi bombarde les manifestants ». Ce canular servit de prétexte pour lancer la guerre de l’OTAN contre la Libye. Les Tunisiens ignorent tout de ce mensonge jusqu’à aujourd’hui. Al-Jazeera n’est pas un complot ancien. Cette chaîne a opéré un revirement, autant spectaculaire qu’assassin dans ses conséquences, à l’occasion de la révolte tunisienne, fondamentalement sincère, laquelle a surpris le monde entier à commencer par les Etats-Unis d’Amérique. L’impérialisme l’a alors rapidement contenue par des promesses financières mirobolantes (Sarkozy/G8 : 25 milliards d’euros) et largement récupérée grâce à la « co-opération » d’Al-Jazeera laquelle est entrée en scène à ce moment là pour « accompagner » les Tunisiens dans « leur accès à la démocratie ». Ainsi, il n’est pas étonnant qu’Obama interpelle le peuple tunisien une dizaine de fois tous les jours, toutes les semaines, tous les mois, depuis un an, sur les ondes de la Radio Nationale Tunisienne)[10]. Pourtant, jamais une telle propagande, aussi grossière quoique passée inaperçue par tous les « observateurs », n’avait-elle eu lieu depuis la seconde guerre mondiale. Elle est comparable dans ses méthodes et ses fins à celle illustrée à la fin du film de Charlie Chaplin, « Le Dictateur », où la voix de ce dernier, diffusée à travers des haut-parleurs, emplit alors l’éther de toutes les rues et routes, villes et villages du pays. Patrick Meney (France Soir) à Tripoli le 15 avril 2011: «Reportage Paisible et loin des combats, la capitale libyenne semble vivre hors du temps. Al-Jazira a affirmé que Tripoli avait été bombardée par l’aviation de Kadhafi. Mais, sur place, on dément». Al-Jazeera a commis des crimes de guerre, à commencer par la diffusion du fameux canular au sujet du « bombardement par Gaddafi de son propre peuple »[11][12] sans oublier la « fatwa » de son curé assassin (Chiekh Al-Qaradawy) qui est allé jusqu’à inciter, en direct à l’antenne, les téléspectateurs à tuer le Guide de la Révolution libyenne d’une balle dans la tête. L’effet du canular universel fut tel (Stephen Lendman) qu’il a même été repris par des « spécialistes-du-monde-arabe » y compris dans le camp soi-disant « anti-impérialiste ». Ainsi René Naba, ex-responsable du monde musulman à l’AFP (Agence France Presse) écrira très tôt dans une analyse totalitaire («portrait total de Gaddafi» en « trois volets ») que ce dernier « noiera dans un bain de sang et sa révolution et ses compatriotes qui ont bravé son autorité, après en avoir tant bavé pendant 42 ans. Près de six mille tués en deux semaines de contestation […] »[13]. Evidemment, la critique de ce pseudo-intellectuel au sujet de la Libye [14], tout comme celle de soi-disant journalistes d’«investigation»(Thierry Meyssan) relayant d’autres canulars d’Al-Jazeera (dont ils ont l’impudence de prétendre dénoncer les méthodes…)[15-16], sans parler de la fumisterie impérialiste de Burhan Henri Ghalioun en Syrie par exemple [17], ne suffisent désormais plus. Certainement une nouvelle chaîne de débat reste-t-elle à créer mais justice doit aussi être rendue, comme à Nuremberg en 1945 [18][19], en attendant tout de même la fin du feuilleton syrien, véritable “copier-coller » de la tragédie libyenne. Al-Jazeera figurera au premier plan sur le banc des accusés.
Postscriptum : Nasser Qandil, directeur du réseau syrien d’informations Top News, lancé le 9 octobre dernier 2011, était invité sur la chaîne Addounia (Syrie) le 9 février 2012 à 22heures (heure de Tunis). Il a révélé que l’activité de son médium avait été suspendue suite à un piratage. De faux messages étaient diffusés sur les téléphones portatifs des citoyens abonnés (un peu à la manière de ce qui s’était passé en Libye à la veille de l’’invasion de Tripoli comme l’avait révélé Sayf El-Islam Al-Gaddafi). Qandil a assuré que le réseau était sur le point d’être réparé et allait reprendre prochainement son activité normale. Il a également annoncé le lancement, quelques jours plus tard à Damas d’une initiative internationale visant à juger, pour crimes de guerre, les responsables des médias (y compris les journalistes dont les noms seront désormais cités ouvertement) tels qu’Al-Jazeera. Note finale et importante: Il serait erroné de penser qu’Al-Jazeera ferait exception et qu’il existerait heureusement des médias alternatifs (comme la BBC, Al-Arabiya, CNN, France 24, Euronews, etc.) non engagés dans la sédition visant à consolider le nouvel ordre totalitaire. Il n’en est rien. Al-Jazeera a été ici pris comme modèle par excellence, comme « cas d’école ». Tous devront rendre des comptes pour leurs activités criminelles. BIBLIOGRAPHIE (sources citées dans cet article):
http://www.legrandsoir.info/qatar-l-hyperpuissance.html
http://www.mathaba.net/news/?x=629657
www.mathaba.net/news/?x=629140
http://www.youtube.com/watch?v=t2knpIqjQts
http://www.mathaba.net/news/?x=629438
http://www.mathaba.net/news/isratine/
http://www.mathaba.net/news/?x=629835
www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=26848
http://www.francesoir.fr/actualite/international/libye-jours-tranquilles-tripoli-90134.html
http://mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=23546
http://www.albared.org/node/23 et http://bit.ly/v1ZV8w
http://www.albared.org/node/266
http://www.albared.org/node/158
http://www.mathaba.net/news/?x=629805
http://mathaba.net/news/?x=628279
(*) Lien vers l’article de l’Express ci-dessus mentionné. Crédit photo(ci-dessus) _____________ # |